Dans sa nouvelle création hybride, la chorégraphe et interprète Karine Denault s'entoure de cinq autres performeurs, les danseuses Dana Gingras et k.g.Guttman, et les musiciens du groupe K.A.N.T.N.A.G.A.N.O (Jonathan Parant, Alexandre St-Onge, Alexander Wilson). À six, ils proposent un univers régi par la pulsion instinctive de l'instant.

Le contexte règne en matière de création artistique. Sans se concerter, les créateurs de toutes disciplines, parce qu'ils captent l'air du temps et l'état du monde, proposent des visions simultanées sur un même sujet. En ce moment, en danse - en Europe surtout, mais aussi ici -, on privilégie le microcosme humain comme laboratoire d'un désarroi collectif, peut-être plus prégnant que d'ordinaire.

Karine Denault, dans Pleasure Dome, y répond en mettant en scène un échantillon d'humanité proche de l'instinct primitif, animal: six créatures au genre peu défini avancent à quatre pattes, couvertes de poils, et communiquent par sons et borborygmes.

Mais ces créatures portent des habits très urbains, utilisent des micros de chanteurs et du matériel électronique très sophistiqué. L'espace scénique de l'Agora a beau avoir été entièrement ouvert, et le public assis alentour pieds nus, on n'en assiste pas moins à un spectacle dans lequel les barrières entre public et artistes ne sont pas abolies.

La musique pulsée et hypnotique du groupe K.A.N.T.N.A.G.A.N.O, comme dans les raves, est aussi irritante qu'obsessionnellement invitante à bouger, mais seules les trois danseuses ont l'air de lâcher (un peu) leur fou, sans parvenir à le transmettre au public, qui reste circonspect. Comment prétendre au plaisir sans communion organique? Ce qui est censé être la pulsion première de la danse reste ici un mystère assez inaccessible.

Pourtant, tout y est parfaitement pensé et interprété: la singularité gestuelle de Karine Denault, sa légèreté aérienne et gracieuse, l'arrimage et la justesse de l'ensemble et la puissance musicale. La sensation, elle, n'est pas au rendez-vous.

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Pleasure Dome, jusqu'au 9 février à l'Agora de la danse. www.agoradanse.com