Paul-André Fortier présente Vertiges, une rencontre intimiste entre le chorégraphe-danseur et le violoniste-improvisateur Malcolm Goldstein. Une performance placée sous le signe de la lenteur et de l'humilité. On connaît le slow food: voici maintenant la slow dance.

Quelques chaises, un panneau de bois, une constellation d'ampoules lumineuses placées à même le sol: ce choix de scénographie minimaliste et feutrée sert à concentrer les regards sur les deux hommes et sublime un duo autrement tout simple.

Vertiges laisse surtout le temps au temps. Le danseur a d'abord le geste très lent et raréfié, une retenue que lui renvoient les quelques notes ténues et soutenues qui émanent du violon de Goldstein. Chacun fait la part belle au silence et à l'immobilité. Fortier n'a rien perdu de son habileté à capter et à soutenir notre attention. Chacun de ses gestes est porteur et sa présence mêle notoirement ascèse et richesse d'intention. Goldstein, pieds nus, dégage un brin d'espièglerie qui contraste avec le port altier de son complice.

Dans Vertiges, Fortier ne dévie pas de son vocabulaire gestuel habituel: nous reconnaissons les bras déployés, prêts au décollage, les passages assis, les mains ouvertes, les balancements, la tête légèrement prostrée... Cependant, cette collaboration avec Goldstein, tout comme celles qu'il a entretenues avec les artistes Betty Goodwin ou Rober Racine, l'entraîne également dans des chemins moins fréquentés.

Si parfois les liens entre le violoniste et le danseur semblent convenus (comme répondre à des coups d'archet nerveux par une gestuelle convulsive), ceux-ci ne sont que préludes à d'étonnants revirements. Ici, le danseur provoque le violoniste à s'exprimer dans un étrange dialecte! Là, Goldstein entraîne Fortier dans des avenues klezmer si peu caractéristiques du chorégraphe. Ailleurs, l'archet du violoniste, qui surtout crisse et rebondit (quand il n'est pas immobile), joue, sans préavis, une magnifique mélodie!

Avec force, lenteur et économie, les deux hommes parviennent à nous fasciner et nous convaincre de leur complicité.

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Vertiges de Fortier Danse-Création. À l'Agora de la danse, ce soir.