Charmaine LeBlanc est une créatrice habitée par une profonde quête de vérité. Avec son spectacle Terminus, qu'elle révèle à compter du 14 novembre entre les murs des Ateliers Jean-Brillant, la metteuse en scène interdisciplinaire arrive à la destination finale d'un voyage en trois escales amorcé il y a huit ans avec le quatuor Quarantaine et qui revenait en version «mâle» en 2008, avec l'acclamé Quarantaine 4X4. Une visite introspective dans l'humanité de six interprètes et un fantôme...

Réunir sur une même scène des interprètes de la teneur de Carole Prieur, Marc Béland, Benoît Lachambre, Mathilde Monnard, Jane Mappin et Marc Daigle, voilà qui relève de l'exploit. «Je n'ai jamais travaillé avec tout le monde à la fois», concède Charmaine LeBlanc, qui a patiemment recueilli les confessions profondes de chacun de ses danseurs, pour nourrir la création d'un spectacle sur le thème des «monstres intérieurs».

«Cette fois-ci, je les ai laissés aller où ils voulaient», s'épanche cette artiste humaniste, qui a vu évoluer et se transformer des interprètes arrivés à une période charnière de leur trajectoire personnelle et professionnelle.

Pour certains, il y a eu le passage à la cinquantaine. L'une d'entre eux, «danseuse en transition», a fait ses adieux à la scène, pour faire autre chose de sa vie. Et il y a eu la mort de Ken Roy, à qui Charmaine Leblanc dédie sa pièce. La présence du danseur disparu à l'âge de 49 ans sera d'ailleurs incarnée par des enregistrements sonores. «Ken a travaillé avec nous jusqu'à deux semaines avant sa mort», raconte la metteuse en scène, évoquant avec une sérénité philosophique les derniers jours de cet interprète et professeur, emporté par le cancer.

«C'était triste, bien sûr, mais l'approche de la mort a donné à Ken une grande ouverture de coeur. Le côtoyer pendant cette période nous a tous donné quelque chose de plus, pour continuer à vivre», témoigne celle qui cuisinait pour Ken Roy, quand il est arrivé au bout de ses forces.

Petits monstres

La vie continuera pourtant, avec ce Terminus qui nous donnera accès aux démons intérieurs de grands danseurs. «Certains ont gratté un peu et d'autres ont plongés profondément», partage Charmaine LeBlanc, qui a travaillé avec la cinéaste Marlene Millar et l'illustrateur Pol Turgeon pour concevoir des animations caricaturales de ces confidences intimes livrées en toute impudeur.

On apprendra ainsi que Carole Prieur, l'étoile des créations de Marie Chouinard, se sent profondément «fake et phony». «C'est pourtant la personne la plus sincère au monde», prétend Charmaine LeBlanc. Benoît Lachambre s'est confié sur son rejet des étiquettes, d'une société qui met encore dans des boîtes les «gais» et les «straights.» On entendra aussi chanter ces artistes surtout habitués à travailler avec leur corps.

«Des fois, on oublie que le monde dans lequel on vit est beau. Ça fait du bien de parler de notre humanité, de nos monstres, des affaires perverses qui font partie de chacun de nous. Au fond, on est tous assez semblables, les êtres humains», réfléchit la créatrice qui prend la botanique comme métaphore symbolique de sa pièce.

À 50 ans, c'est loin d'être fini. Même si ultimement, on se dirige tous vers le même terminus.

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Terminus, une création de Charmaine LeBlanc, du 14 au 24 novembre aux Ateliers Jean-Brillant. Informations: lesateliersjeanbrillant.com