La semaine prochaine, Danse Danse présente en rafale quatre spectacles de Marie Chouinard pour fêter les 20 ans de sa compagnie. Vingt ans de créativité qui se renouvelle tout en conservant sa singularité. Entrée dans la compagnie il y a 16 ans, la danseuse Carol Prieur témoigne.

Depuis 1995, soit quatre ans après la fondation de la compagnie, Carol Prieur a été de toutes les productions, films (Cantique no.1 pour lequel elle a reçu un prix d'interprétation au Moving Pictures Festival de Toronto), chorégraphies, dont des solos créés pour elle (Humanitas, Étude poignante, Mouvements) de toutes les tournées aussi, aux quatre coins du monde, partout saluée pour son talent éclectique. En 2010, le magazine autrichien Tanz l'a nommée meilleure danseuse de l'année.

Au fil des années, une complicité professionnelle s'est installée entre Marie Chouinard et elle: «J'ai une totale confiance, dit-elle, je suis prête à la suivre dans n'importe quelle démarche. Toutes mes barrières et mes défenses sont tombées avec le temps. Je comprends sa vision, sa poésie, son énergie. Au fil des années, on a passé tellement de temps à développé des processus de création que s'est installée entre nous une connexion particulière qui fait que parfois on n'a même pas besoin de paroles.» Elle précise: «On ne se fréquente pas en dehors du studio, mais le studio, c'est l'endroit où je passe la majorité de mon temps. C'est juste ça, ma vie.»

Ce n'est pourtant pas ce qu'elle se disait au début, quand elle étudiait la danse à New York, Vienne ou en Inde où elle s'est initiée au martial Kalarypayattu. «J'adore la danse pour sa physicalité, sa communicabilité, sa liberté, mais je ne pensais pas que ce serait mon métier.» Sa carrière a pourtant débuté au sein du Winnipeg Contemporary Dancers et s'est poursuivie auprès de Jean-Pierre Perreault. Puis à 20 ans, en 1991, elle voit Les trous du ciel, la première pièce de groupe de la compagnie Chouinard: «Quelque chose s'est allumé en moi, dit-elle. Sur la scène, j'ai vu une sorte de rituel sauvage et j'ai pensé «c'est ma tribu, je dois aller la rejoindre»!»

Quand elle parle, Carol Prieur est vive, subtile et expressive tout comme elle l'est sur scène. Avec Marie Chouinard, elle partage une vision spirituelle de la danse comme lien avec le plus grand que soi: «La danse est ma religion, affirme-t-elle. Le studio est pour moi comme une église, un lieu sacré, une sorte de cérémonie animiste. Dans la compagnie, j'ai trouvé ma place pour continuer à développer cette vision sacrée. Chaque jour est une nouvelle célébration.» Car, bien qu'elle danse depuis plus de 20 ans, elle dit apprendre lentement et devoir s'améliorer sans cesse: «J'espère un jour voler! dit-elle en riant, on est tous des êtres évolutionnaires». Magnifique lapsus. Le mouvement est en effet une révolution perpétuelle.

Elle est bien sûr du programme de célébration des 20 ans de la compagnie qui débute le 5 avril. Quatre pièces: Les trous du ciel, justement, un retour sur la première pièce qui compte cette fois sept danseurs, Étude no. 1, solo pour Lucie Mongrain, ainsi que deux pièces fétiches Orphée et Euridyce et bODY_rEMIX_vARIATIONS_gOLDBERG.

Marie Chouinard reprend aussi son propre solo, Gloires du matin, et présentera en mai Les feux de la nuit, pour la première fois un solo pour un danseur, Manuel Roques, sur une composition de Rober Racine interprétée live. «Marie va continuer à évoluer, conclut Carol Prieur en évoquant ces deux décennies passées. L'inconnu est toujours devant nous, mais je suis heureuse de la formidable reconnaissance mondiale qu'elle a acquise et aussi du bâtiment où la compagnie est maintenant installée. Grâce à cette base, on va pouvoir croître au lieu de juste penser à survivre. Et je pense que ce lieu deviendra un pôle de rayonnement pour toute la communauté de danse montréalaise.»

Trois programmes Marie Chouinard: Les trous du ciel et Étude no. 1 (5 avril), Orphée et Euridyce (7 avril), bODY_rEMIX_vARIATIONS_gOLDBERG (9 et 10 avril), au Théâtre Maisonneuve.