Avec ou sans l'aide du gouvernement fédéral, les arts de la scène montréalais s'exportent. La danse, plus particulièrement, reste l'un de nos secteurs de pointe (s) les plus en demande. Hélène Blackburn, Daniel Soulières, Louise Bédard et Kathy Casey l'ont bien compris.

Chose unique, ces quatre chorégraphes et directeurs artistiques forment équipe. Ils ont créé un consortium, auquel s'est joint ensuite PPS Danse, pour mieux se promouvoir à l'étranger. Ils ont embauché le meilleur vendeur possible, Denis Bergeron, nommé directeur de diffusion d'Art Circulation, un organisme créé en 2007.

«Le plus grand problème pour eux, c'était de trouver quelqu'un qui avait l'expérience et le background. J'en ai tout un», fait-il en riant.

Jeune, il admirait les Gene Kelly et Fred Astaire. Il a donc suivi des cours en claquettes, ballet, jazz... Mais à 25 ans, il était trop tard pour faire carrière.

«Mon vrai travail, c'était le transport. Je dansais sur scène et la nuit j'allais accueillir des navires dans le port de Montréal, un peu comme un directeur de tournée des compagnies maritimes! J'étais bien rémunéré dans le transport, mais j'avais la piqûre pour la danse.»

Il n'y avait donc qu'un petit pas, un petit saut à faire afin de devenir gestionnaire culturel. En 1992, Denis Bergeron a créé sa première entreprise, TransArt. Puis il a travaillé à Vancouver, «mais ils me trouvaient trop pro-québécois», fait-il.

Les Grands ballets, l'équipe Spectra, Les Violons du Roy, Margie Gillis font ensuite appel à lui. Avec ce parcours fait d'allers et de retours constants, on peut dire de Denis Bergeron qu'il est un vrai touche-à-tout.

«Mais quand, au Festival de jazz, on a payé 200 000 $ à Bob Dylan pour un spectacle où il se foutait du public, j'ai repensé à tous ces artistes, danseurs notamment, qui peinent pour vivre, et je me suis dit que je reviendrais définitivement à la danse», dit-il.

La circulation de l'art

L'expérience d'Art Circulation est des plus concluantes. Les compagnies tournent plus que jamais, abordent de nouveaux pays et publics, en utilisant de nouveaux outils de vente, dont l'internet et les DVD. En moins de trois ans, Denis Bergeron s'est construit un réseau international impressionnant.

La clef du succès par rapport à d'autres idées du genre, selon lui: un conseil d'administration représentatif de toutes les compagnies. Le concept, reconnaît-il aussi, pourrait fort bien être repris par d'autres troupes en arts de la scène.

En outre, ce sont les artistes eux-mêmes qui ont créé le concept avec Denis Bergeron. Comme salarié, lui, il s'affaire à voir à long terme quand il parcourt la planète et non pas uniquement au prochain spectacle.

«Mon rôle n'est pas un rôle d'agent tout à fait comme les autres, dit-il. Un agent, parfois, peut laisser tomber une compagnie après un spectacle qui a connu moins de succès. Ça arrive. Ce n'est pas mon cas.»

Maximisation des ressources

Pour les cinq compagnies - Cas Public, Montréal Danse, Danse-Cité, Louise Bédard Danse et PPS Danse - les ressources sont utilisées de façon maximale et selon les besoins de chacune.

«Les compagnies ne tournent pas tous les ans. Quand elles sont en développement, le travail se déroule moins dans les voyages. Mais avec cinq compagnies, il y a suffisamment de travail», explique-t-il.

Autre situation rarissime, faut-il ajouter, les compagnies ont accepté d'ouvrir leur bilan financier entre elles afin d'assurer la transparence et l'équité.

«C'est certain que mon rôle, note-t-il, c'est aussi de pouvoir tenir l'équipe ensemble. C'est un travail de communication. Je vends, mais je conseille énormément comme je suis en contact constant avec les diffuseurs.»

Et la concurrence entre elles? Les cinq travaillent dans le domaine pointu de la danse contemporaine, après tout.

«Quand j'étais agent indépendant, il y a 10 ans, je faisais en sorte que le territoire et les caractéristiques de chacun soient respectés. C'est le même principe avec le consortium. Chacune des compagnies est prête à accepter de faire les compromis nécessaires pour assurer leur survie.»

En un mot

Globe-trotter de pointe

Montréal, c'est

«Un laboratoire, l'un des plus grands dans les arts de la scène qui existent sur la planète, où l'on donne aux artistes une chance de se refaire.»

Que dit-on de Montréal ailleurs?

«Les artistes étrangers veulent venir ici parce qu'ils sentent qu'ils vont s'en inspirer. Quand ils viennent, ils voient des spectacles extraordinaires et ils sont effectivement inspirés. En danse, on est très connu partout.»

Que manque-t-il à Montréal?

«On a besoin de créer davantage de projets en collaboration avec d'autres pays. C'est l'avenir.»

À voir sur le web

artcirculation.org