Tandis que le FTA bat son plein à Montréal, dans la région parisienne se déroulent les Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis, festival annuel qui présente ce que sera la danse de demain. Les chorégraphes québécois Mélanie Demers et Jean-Sébastien Lourdais y ont été très remarqués.

Cette année, les échanges entre danse française et québécoise suscitent la curiosité. Le festival d'Avignon présentera Dave St-Pierre (Un peu de tendresse bordel de merde) dans la Cour des Papes, mais aussi Lynda Gaudreau et Clara Furey dans le cadre de l'événement parallèle Le vif du sujet. Et la France, elle, sera la Destination Danse 2009 de l'Agora de la danse qui présentera quatre chorégraphes français en septembre.

 

Dans l'attente, Mélanie Demers et Jacques Poulin-Denis (Les angles morts) et Jean-Sébastien Lourdais (Contrôle réaction) ont emporté l'adhésion du public des Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis, festival annuel d'envergure qui, depuis le 11 mai et jusqu'au 5 juin, présente 22 compagnies venues de 10 pays différents dans huit salles de cette vaste banlieue de Paris.

C'est le fameux département 93, dont on entend souvent parler parce que les voitures brûlent et que les jeunes se battent avec la police. Or depuis 2002, au coeur de ces banlieues réputées difficiles, Anita Mathieu, directrice des Rencontres, et son équipe, ont réussi à instaurer un intérêt des jeunes pour la création artistique, notamment chorégraphique. Et ça fonctionne: dans les salles de spectacle de nombreux adolescents se mêlent aux adultes, tous venus de leur plein gré et non pas dans le cadre d'une sortie scolaire obligatoire.

Mélanie Demers a été très impressionnée. Les angles morts est une pièce à la fois dure, poétique et pertinente sur la différence, la difficulté des relations et du partage des émotions. L'interprétation est puissante, physique, interpellante.

«Les jeunes présents ont adoré, souligne-t-elle. Ils ont reçu la pièce et ont tout de suite adhéré.» Et elle, comment a-t-elle vécu cette première expérience des Rencontres chorégraphiques de Seine-St-Denis: «C'est génial! dit-elle. Nous avons beaucoup tourné en Europe et en Afrique, mais là, c'est Paris et c'est un festival très important pour la relève parce que beaucoup de programmateurs européens y font leur marché.»

Surtout que pour elle, tout s'est très bien passé: «Super bien passé!» dit-elle avec son grand sourire. En effet, pour un premier passage parisien, on en a parlé dans Libération et sur 93.agendaculturel.fr. Anita Mathieu, ravie par la pièce, a décidé, dans la foulée, de coproduire son prochain spectacle dans le cadre de la présentation 2010.

Une première pour Lourdais

Pour Jean-Sébastien Lourdais et son solo Contrôle réaction, une pièce choc, viscérale et charnelle, où il déploie sa virtuosité d'interprète et sa finesse d'analyse des comportements humains et animaliers, les choses se sont aussi très bien passées. Lui, le Français (d'origine bretonne), n'avait jamais dansé hors du Québec où il a fait ses études, a démarré la création et eu un fils. Ce fut sa première présentation en sol natal et sa famille est venue le voir, aussi impressionnée que le reste du public par l'audace magnétique de cet artiste singulier, qui a retenu l'attention de nombreux programmateurs européens.

Ce festival joue ainsi son rôle singulier dans l'univers foisonnant de la danse contemporaine française, une des mieux structurées d'Europe. Anita Mathieu parie sur les jeunes artistes qui ont une vision et un propos, même si leur danse n'est pas encore établie. Elle sillonne la planète pour dénicher de nouveaux talents et les présenter lors de son festival en mai. Le reste de l'année, elle orchestre un travail de sensibilisation à la création artistique, plus de 700 heures de formation assurées par ses équipes dans les écoles et collèges du département 93. Un type de formation des jeunes publics qui gagnerait à se développer au Québec.

Anita Mathieu coproduit les quatre chorégraphes français que l'Agora de la danse présentera en septembre prochain dans le cadre de sa deuxième Destination Danse: Nacera Belaza, Julie Nioche, Pierre Rigal et Fabrice Lambert. À suivre.