Connue pour ses pièces pour adultes, souvent fougueuses et performantes (dont la dernière Suites cruelles, créée en janvier 2008 en coproduction avec Danse Danse), la chorégraphe Hélène Blackburn n'a jamais considéré les jeunes comme un «sous-public». Au contraire, elle a bâti ses pièces pour jeune public avec un intérêt marqué pour l'univers imaginaire de l'enfance (comme dans Barbe-Bleue, 2006) ou les interrogations amoureuses de l'adolescence (Journal Intime, 2007). Si pour aimer lire, il faut lire dès l'enfance, et trouver donc des livres adaptés, il en va de même pour la danse, croit-elle.

«Mon père de 75 ans ne comprenait rien à mes pièces, confie Hélène Blackburn, jusqu'à ce que je fasse des pièces pour les jeunes. D'un coup, il a été soulagé de comprendre et d'aimer. Moi aussi, ça m'a fait du bien, comme si d'un coup, je voyais l'enfant dans mon père.» Cela rappelle que les barrières entre publics ne sont pas si étanches. De la bonne danse reste de la bonne danse. Ainsi Cas Public, la compagnie de Blackburn, existe depuis 18 ans et a installé sa présence continue sur les scènes nationales et internationales, avec ses pièces pour adultes ou pour jeunes.

 

La nouvelle pièce relève un défi supplémentaire, celui de cibler un public rarement sollicité, celui des 4 à 8 ans. Pour ce faire, Hélène Blackburn a concocté un collage original entre un conte d'Andersen, Le vilain petit canard, et le ballet classique par excellence sur musique de Tchaïkovski, Le lac des cygnes. Le tout dans la forme inattendue des cabarets allemands des années 20, faits de successions de tours de chants et de numéros très courts accompagnés au piano. Subtil mélange, élaboré d'après les recherches du conseiller Paul Lefebvre, transposées en une facture visuelle singulière par l'artiste Fero Liptak. Au final, ce Cabaret dansé des vilains petits canards est une pièce pour trois danseurs dans une succession de danses et de chansons écrites par Georges-Nicolas Tremblay sur les musiques de Laurier Rajotte.

Une belle faconde pour transmettre un message non moins raffiné: «C'est important de présenter des oeuvres complexes aux enfants, analyse la chorégraphe, justement parce que ce sont des enfants et que les enfants sont habitués à ne pas tout comprendre du monde et à le décoder. Il faut leur donner de la matière à décodage.»

Elle, justement, a voulu bouleverser la vision convenue du conte d'Andersen aussi bien que du Lac des cygnes de Riabov: «Dans le conte d'Andersen, en fait, le canard est laid parce qu'il n'est pas un canard et quand il devient ce qu'il est, un cygne, tous l'admirent au lieu de le rejeter. Mais lui n'a rien fait pour se transformer, c'est un rôle passif! Et puis, devenir un cygne, ce n'est pas forcément la panacée, la preuve: Odette, le cygne noir du ballet, est coincée dans un rôle nul et rêve de devenir un humain. Alors, dans ma pièce, je les fais se rencontrer!» Une vision plutôt désenchantée, non? «C'est l'âge où les enfants commencent à perdre leurs illusions! renchérit Blackburn. Et puis c'est drôle aussi. Il y a autant de rires que d'applaudissements.»

La danse à États d'urgence

Dans le cadre du 10e État d'urgence de l'Action terroriste socialement acceptable, la chorégraphe française Héloïse Rémy inscrit un nouvel épisode humaniste de son parcours à dimension planétaire, qui la conduit à parcourir le monde pour proposer un geste chorégraphique à des non-danseurs, histoire de les lier dans un geste humain par-delà les frontières terrestres et surtout sociales.

Plusieurs répétitions sont offertes à ceux et celles qui veulent participer à La traversée. Inscription via le site: www.atsa.qc.ca. Également, Danses invisibles, des tableaux dansants silencieux et lents en contrepoint du rythme saccadé de l'activité urbaine, avec Léna Massaini et Katya Montaignac de O.D.N.I. (Objets dansants non identifiés). À découvrir au parc Émilie-Gamelin, du 26 au 30 novembre.

 

À l'agenda

> Warning, Dave St-Pierre et Mandala Situ, du 25 au 29 nov. à La Chapelle.

> Les chambres de Jacques, Aszure Barton pour les BJM, du 27 au 29 nov. au Théâtre Maisonneuve.

> Territoires féminins, Marie-Claude Rodrigue, jusqu'au 30 nov. au MAI.

> Le cabaret dansé des vilains petits canards, Hélène Blackburn, du 26 au 29 nov. à Tangente.