Malgré toutes ses qualités, le Canada reste un drôle de pays, difficile à saisir, de par sa complexité tant géographique que politique. Imaginez en faire un personnage de théâtre!

En voulant mettre en lumière un épisode peu glorieux de l'histoire canadienne (le massacre du peuple métis à Batoche, en Saskatchewan, en 1885), Le Wild West Show de Gabriel Dumont nous propose, pendant deux heures trente, un bouillon multiculturel à sauveur plus comique qu'historique. Le résultat est divertissant, certes, mais pas vraiment nourrissant.

Cirque historique

Signé par 10 auteurs de divers horizons artistiques et provenant de différentes régions du pays, l'objet est plus proche du vaudeville que du théâtre comme tel. Avant la représentation, les comédiens nous accueillent d'ailleurs avec du popcorn dans le hall du Théâtre d'Aujourd'hui, habillés en musiciens de fanfare.

Le récit, très éclaté, tourne autour du héros de la révolte des Métis, le commandant Gabriel Dumont, bras droit de Louis Riel. 

Vouloir faire connaître la contribution héroïque de Dumont à la reconnaissance des minorités au pays, cela est fort louable. Car notre histoire a davantage retenu celle du fondateur du Manitoba qui, après la rébellion des Métis, a été fait prisonnier puis pendu à la prison de Regina. Tandis que Gabriel Dumont s'est réfugié aux États-Unis. Il y a été recruté par nul autre que Buffalo Bill pour participer aux tournées de ses «wild west shows»; d'où cette proposition de Dalpé, Martin et leurs complices.

Irrévérencieux

La pièce mêle vaudeville et western américain, chant et danse traditionnels amérindiens, poésie et rodéo, jeu-questionnaire télévisé et imitation de personnalités (Don Cherry et René Lecavalier commentant un match de hockey). On a même droit à un combat de boxe entre le «prophète» Riel et le mal-aimé premier ministre du Canada, John A. Macdonald. 

Entre parodie et cabotinage, les sketches sont entrecoupés par des scènes plus dramatiques. 

À défaut «d'une grossière manipulation de l'Histoire» à l'anglaise, Le Wild West Show privilégie l'éclatement formel, l'irrévérence du propos et l'anachronisme historique. La mise en scène de Mani Soleymanlou tente tant bien que mal de mettre du liant à cette matière fluide, décousue. La distribution s'amuse, comme si elle jouait dans une revue (et corrigée) de fin d'année... 1885!

Ce spectacle en six langues (dont l'anglais, le cri, le français et l'algonquin) est une coproduction du Théâtre français du CNA, du Nouveau Théâtre Expérimental, du Théâtre Cercle Molière et de La Troupe du Jour. Après Montréal, il sera présenté à Winnipeg et Saskatoon.

On y va? 

Oui, si vous aimez la parodie, le vaudeville expérimental, les spectacles éclatés et les points de vue multiples sur une réalité historique.

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Le Wild West Show de Gabriel Dumont. Collectif d'auteurs (dont Jean Marc Dalpé, Alexis Martin, Yvette Nolan, etc.). Mise en scène de Mani Soleymanlou. Avec Alexis Martin, Jean Marc Dalpé, Émilie Monnet, etc. Au Centre du Théâtre d'Aujourd'hui jusqu'au 18 novembre.

photo Jonathan Lorange, fournie par la production

Les comédiens du Wild West Show de Gabriel Dumont accueillent le public habillés en musiciens de fanfare.