Il faut rendre à César ce qui appartient à César. Pour sa 41e production, le Cirque a promis de sortir des sentiers battus et il a tenu parole. Il a aussi voulu s'adresser plus franchement aux jeunes, et c'est ce qu'il fait avec un certain succès.

D'abord sur le plan musical avec la synthpop électro accrocheuse du groupe français M83. Mais aussi sur le plan narratif, où l'on nous raconte pour une rare fois une histoire compréhensible. La scénographie, avec les projections et les éclairages, donne également une facture beaucoup plus contemporaine. Et les costumes, toujours aussi flamboyants, tranchent avec les amazones, coccinelles, hommes-lézards et autres créatures étranges qu'on a vus ici ad nauseam.

Pour tout cela, il faut saluer l'audace du Cirque qui a permuté les ingrédients d'une recette qui lui a été jusqu'à présent assez profitable. Est-ce qu'on peut parler de renouveau pour autant? Trop tôt pour le dire, mais l'impulsion et l'énergie de ce spectacle sont bonnes.

Le thème choisi par les deux jeunes recrues du Cirque qui ont créé et mis en scène Volta - Alexandre Bastien et Jean Guibert - s'inscrit dans cette opération séduction auprès des jeunes: les sports extrêmes. Bungee, parkour, vélo acrobatique, fil de fer, BMX, les deux créateurs de Volta ont opté pour un show d'adrénaline axé sur la performance acrobatique - qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler iD d'Éloize.

Ce cirque contemporain survitaminé n'est pas sans défaut, et la prouesse pour la prouesse a ses limites, mais il y a une cohérence indéniable avec ce groupe d'acrobates. 

Ces performances - certaines moins extrêmes (les numéros de bâton, de patin à roulettes) - s'appuient sur une histoire assez simple qui tourne autour du personnage de Waz. Cet animateur d'un jeu télévisé consacre des élites qui sont ensuite décorées d'une coiffe et d'une tunique qui les rendent toutes semblables et ternes. Lui-même y voit le moyen de cacher ses cheveux de plumes bleues, dont les enfants se moquaient quand il était petit.

Si l'histoire de Waz se comprend assez bien, le lien avec le jeu télévisé et le groupe des Élites est moins évident.

Toujours est-il que notre ami Waz rencontrera le gang des Esprits libres par l'entremise d'une belle donzelle. Ces personnages libres et colorés l'amèneront à s'accepter comme il est, avec ses cheveux de plumes bleues. 

Le scénario peut paraître simplet, mais il charrie beaucoup d'émotions et il a le mérite d'être clair, contrairement à certaines histoires alambiquées qu'on nous a déjà servies. L'image d'une société automatisée, rivée à son téléphone intelligent, est aussi bien exploitée. 

Des bémols. Sur cette scène «intelligente» - qui se fractionne et s'élève -, le déploiement des (trop) nombreux appareils acrobatiques alourdit le spectacle. Outre l'immense cube qui sert de loge et d'écran (très bien !), on nous sort deux immenses échelles, deux installations de fils de fer, plusieurs jeux de barres parallèles et d'immenses rampes pour accueillir les vélos BMX. Évidemment, le temps de fixer ces appareils, il y a beaucoup de bourdonnement. 

Soyons clairs, ce numéro final de vélos BMX est le clou de Volta, impossible d'y être insensible, le Cirque nous en met plein la vue. Là, oui, les amateurs d'émotions fortes se régaleront! Tant et tellement qu'on se croirait aux X Games plutôt qu'au cirque.

On n'est plus du tout dans l'histoire de Waz non plus. Plutôt face à de jeunes cascadeurs qui bombent le torse, poussent des cris de victoire et se font des high five. C'est aussi un peu ça, Volta.

Il reste que dans cette enfilade de sports extrêmes et de prouesses acrobatiques se glissent d'épatantes performances, bien senties, que ce soit à la corde à sauter, aux anneaux chinois, dans le numéro de vélo acrobatique et de ballet ou encore dans des numéros aériens originaux (accroché à une lampe suspendue et même par les cheveux!). Finalement, malgré le côté un peu bling-bling et tape-à-l'oeil de Volta, on apprécie la prise de risque du Cirque qui a le mérite d'explorer de nouvelles avenues et de nous insuffler une énorme dose d'énergie. 

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Jusqu'au 23 juillet sous le chapiteau du Cirque du Soleil dans le Vieux-Port de Montréal