À 41 ans, Julien Tremblay a choisi de faire le grand saut en présentant mardi soir au Théâtre St-Denis son tout premier spectacle solo.

Sorti il y a plus de 20 ans de l'École nationale de l'humour, le Franco-Ontarien est de la même promotion que Laurent Paquin et Mike Ward, qui signent d'ailleurs respectivement la mise en scène et la «script-édition» d'Humble et magnifique. Avec une telle équipe de vieux routards de l'humour, Julien Tremblay avait peu de risques de faire de fausses notes. Il a pourtant peiné à nous séduire. Et bizarrement, c'est le personnage qui lui aura valu d'être la Révélation de l'année 2015 du festival Juste pour rire (qui produit son spectacle) qui nous aura le plus rapidement lassée.

Présenté lors de six galas cet été-là, son personnage d'humoriste-guitariste avait été chaudement applaudi par le public.

Julien Tremblay a un talent d'acteur indéniable: il bouge et s'exprime avec aisance. Le hic, c'est qu'il faut savoir ne pas abuser des bonnes choses.

L'humoriste a fait son entrée comme une rock star, proposant une scénographie intéressante avec un dispositif d'éclairage digne d'un concert. Pour son premier spectacle, il prend le temps de se présenter: natif d'Hawkesbury, il est «humoriste de métier, mais musicien dans l'âme». De son déménagement à Laval à sa vie de couple montréalaise, Julien Tremblay enchaîne les blagues entrecoupées des mêmes accords à la guitare.

L'humoriste a une présence scénique et un charisme indéniables. Mais après 10 minutes, on commence à se tanner de l'alternance joke/guitare qui se poursuivra pendant une bonne demi-heure autour de thèmes comme l'expérience D-Box au cinéma et les émissions de télé québécoises, écorchant au passage Jean Airoldi et ses conseils de style. «T'es qui pour discuter ma garde-robe? T'es le meilleur, t'es dedans depuis 40 ans», a-t-il lancé à la blague avant de confier:  J'ai pas 42 000 $ pour cette joke-là, je suis dans la marde», faisant bien entendu référence au procès en cours entre Jérémy Gabriel et Mike Ward, son «script-éditeur». Une blague qui lui permet d'assurer la transition vers des thèmes comme l'homosexualité et les différences générationnelles.

Pause inattendue

Quelle ne fut pas notre surprise quand est venu le moment de... l'entracte. Après la pause, Julien Tremblay a pris le temps de converser un peu avec son public. Un moment d'improvisation qui nous a redonné l'espoir de découvrir une nouvelle facette de l'humoriste dans la seconde partie du spectacle. Julien Tremblay passe momentanément en mode stand-up, sans sa guitare, dressant la liste des personnes «qui méritent des "wow" dans la vie» avant d'enchaîner avec un numéro assez réussi sur les émissions de Canal D. Mais c'est quand il parle de sa mère et de ses chats que Julien Tremblay nous démontre enfin son plus grand talent: sans son instrument, il bouge, mime et conte pour réellement jouer la comédie.

Cependant, le moment de grâce est interrompu lorsqu'il retourne à sa guitare (!) pour parler de son ami célibataire qui pourrait avoir sa propre émission à Canal D intitulée Un fourreur si proche et qui est si occupé par ses conquêtes qu'il a un «vaginda». Certainement pas le segment le plus apprécié d'Humble et magnifique, un spectacle qui aurait mérité une bonne grosse dose de diversité, surtout qu'on ne doute pas un instant que Julien Tremblay a beaucoup plus à offrir. Avec un tel talent de comédien, il est capable de faire des étincelles. Il n'est pas le seul humoriste à aimer se servir d'un instrument sur scène. Si les Phil Roy, Olivier Martineau, Neev et Gad Elmaleh de ce monde aiment également gratter quelques accords dans certains de leurs numéros, ils le font avec beaucoup plus de parcimonie. Le plus frustrant, c'est qu'en fin de compte, Julien Tremblay n'aura jamais vraiment chanté, ce qui aurait pu nous surprendre. On aurait aimé découvrir sur scène l'artiste multidisciplinaire qu'on nous promettait.

Enfin, profitons de l'occasion pour passer un message: les entractes dans les spectacles d'humour, c'est non. Ça casse le rythme et ce n'est pas nécessaire pour une performance de 90 minutes. Quant au fait de recycler des numéros présentés dans des Galas Juste pour rire, cela devrait tout simplement être interdit. Le public mérite plus que ça.

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À la salle Albert-Rousseau de Québec, le 30 novembre, puis en tournée au Québec jusqu'en septembre 2017