«Il y a une économie d'un demi-milliard ici dans la salle. Ceux qui ont payé pour leur billet sont les pauvres, puis ceux qui ont de l'argent ont été invités. Ce show-là a été conçu pour les pauvres.»

Simon Leblanc a le sens de la formule et, lors de la première médiatique de son spectacle solo Tout court, mardi au Gesù, il a offert une performance olympique (près de deux heures, sans entracte) et authentique (il n'a pas de texte et suit une simple feuille de route), avec des envolées si drôles qu'on en perd parfois le souffle.

Les soirs de première comportent leur lot de rires «en canne». Pour faire bonne impression, on invite la communauté tissée serré des humoristes à venir rire aux éclats et à se taper frénétiquement sur les cuisses. Mais cette fois-ci, en plus d'avoir attiré pour sa première nul autre que Yvon Deschamps, Simon Leblanc a causé la surprise par sa verve décousue et le rythme haletant de ses histoires rarement ennuyeuses.

Pour une fois, le résultat ne fait aucun doute: les rires sont sincères et le plaisir du conteur sur scène est contagieux.

Le monde selon Leblanc

Tout court - un spectacle qui a été présenté plus de 140 fois en province au cours de la dernière année - aborde les thèmes qui ont marqué Simon Leblanc lors de son déménagement à Montréal, où il vit depuis quelques années, dans le quartier Saint-Henri.

Lorsqu'il est arrivé en ville, il s'est d'abord établi sur le Plateau, mais a quitté peu après l'arrondissement qui le mettait sans cesse devant le fait qu'il était plus laid que ses voisins et qu'il ne jouait pas dans Yamaska.

La circulation (c'est aussi long de faire Montréal-Brossard que Brossard-Île-du-Prince-Édouard), les urgences dans les hôpitaux (où il a été forcé d'uriner dans un pichet), sa famille gaspésienne (et sa vieille grand-mère sèche), ainsi que son allergie aux funérailles (avec les curés qui s'habillent comme des drag-queens à la retraite): les sketches de l'humoriste sont à la fois personnels et grand public, un mélange bien dosé qui a tout ce qu'il faut pour rassembler un auditoire multigénérationnel.

On se surprend toutefois à entendre le jeune humoriste faire des blagues de «mononcle» sur des «butchs», alors qu'on peut si facilement rire de thèmes LGBTQ+ avec finesse et intelligence.

Mais bon, on assiste ici à son premier spectacle, alors que son prochain - Malade, déjà en rodage - risque de nous surprendre davantage.

Le plaisir d'écouter des histoires

Un conteur, un micro et la communication d'une imagination foisonnante: Simon Leblanc ne réinvente rien avec Tout court, mais il s'inscrit dans le paysage culturel québécois comme la suite logique d'un mélange de stand-up et d'histoires racontées à la Fred Pellerin.

Pas besoin de mise en scène quand les histoires sont si imagées qu'on en oublie la grande scène vide qui entoure l'humoriste.

Le rire contagieux de l'humoriste est toutefois excessif. Chacune de ses phrases est parsemée d'un rictus au départ sympathique, mais qui finit par briser le rythme. En se maîtrisant un peu, il pourrait ainsi mieux «puncher» ses répliques.

Mais on hésite à lui reprocher sa bonhomie, alors que cet aspect de sa personnalité contribue à le rendre si attachant. Chose certaine, comme il le dit lui-même sur son site internet, son spectacle «commence à être drôle pour au moins 25-30 piasses».

On dirait plutôt qu'à ce prix, Simon Leblanc est une aubaine qu'il ne faut pas manquer.