Le théâtre d'été fait courir les foules. Au volant  de sa Toyota Matrix, notre journaliste s'est faufilé dans quelques salles de l'extérieur de Montréal pour critiquer les pièces à l'affiche, décrire l'ambiance, voire le menu compris dans certains forfaits.

Oui, c'est beau, Bromont. Le monde est chic, les glissades d'eau sont chouettes et le paysage est bucolique. Bref, c'est un peu comme Saint-Sauveur, mais avec moins de mouches noires et de bouchons.

C'est dans ce décor champêtre qu'on présente tout l'été la pièce Deux hommes tout nus, un texte de l'auteur français Sébastien Thiéry, adapté et mis en scène par le comédien Bernard Fortin (une production Juste pour rire).

Une comédie prévisible qui aborde pour la énième fois le thème calciné de l'homosexualité refoulée, mettant en vedette Henri Chassé, Danielle Proulx, Marc St-Martin et Marie-Pier Labrecque.

Le rideau se lève sur deux hommes tout nus (tout est dans tout!), Alain (Henri Chassé) et son collègue Rioux (Marc St-Martin), qui se réveillent en sursaut sur le sofa de l'appartement du premier, un avocat sérieux et un mari irréprochable, sauf une fois (ou deux) au chalet.

Oui madame, ça commence raide, un full frontal, encore plus quand on est assis au centre de la troisième rangée d'une immense salle remplie de 700 à 800 personnes, où il fait si chaud que des spectateurs s'éventent avec leur programme.

Bref, les deux hommes émergent en panique dans l'appartement chic de l'avocat (avec une fausse vue imprenable sur un centre-ville). Et comme dans le film Hangover, ils ne se souviennent absolument de rien, sinon qu'ils sont fin prêts à prendre part au casting de l'émission Célibataires et nus.

Ça rit déjà fort dans la salle, en regardant le jeune Rioux se cacher le sexe avec tout ce qui lui tombe sous la main, dont un tapis d'entrée sur lequel il est écrit «bienvenue».

Même si c'est niaiseux, impossible de ne pas s'esclaffer en voyant le jeune avocat bégayer un «Bonsoir madame et... bienvenue!» en pointant du menton le tapis, lorsque la femme d'Alain (Danielle Proulx) débarque sur ces entrefaites.

Celle-ci, catastrophée, pose derechef ZE question: «Qu'est-ce que vous faites dans mon salon tout nus?!?», tout juste avant de trouver un préservatif «bien rempli» dans le sofa.

Plutôt que d'avouer la vérité (ils n'en ont aucune $?@&*# idée), les deux hommes s'enfoncent dans une spirale mensongère, tout en menant l'enquête pour découvrir ce qui s'est passé.

Quant à la femme d'Alain, elle n'a pas le choix d'admettre ce qui est aussi évident qu'un tatouage tribal au Beachclub: «Ton homosexualité saute aux yeux!», lance-t-elle à l'homme avec qui elle vit depuis 30 ans.

S'ensuit une énumération de clichés digne des années 80 autour du thème de l'homosexualité.

«Je déteste l'opéra et je ne fais pas de musculation. J'ai même pas de caniche!», plaide l'avocat, dans le déni total.

Mais le mal est fait: sa femme plie bagage et l'abandonne seul, quelque part entre le placard et le salon.

Fin du premier acte.

Mais l'histoire se répète quelques jours plus tard.

En copier-coller.

Le sofa. Les deux hommes tout nus qui n'ont aucun souvenir de la veille. La capote pleine et la femme qui débarque sur ces entrefaites.

«Fuck! C'est le jour de la marmotte!», lance Alain, déridant le public.

«Allez, on est en 2016, tu ne seras pas le premier vieux gai à faire ton coming-out!», lance sa femme.

Pour convaincre tout le monde (et lui-même) que ce n'est pas le cas, Alain s'invente une maîtresse (Marie-Pier Labrecque) et insiste pour se faire surprendre avec elle les culottes baissées.

Cette partie du spectacle est de loin la plus rigolote. Marie-Pier Labrecque est parfaite dans son rôle d'escorte coincée bien malgré elle dans un psychodrame entre Alain et sa femme.

Ces derniers tendent un piège à l'associé Rioux, qu'ils soupçonnent d'être responsable de tous leurs malheurs. Finalement, le chat sortira du sac et tout rentrera dans l'ordre, comme dans toute bonne comédie d'été.

Décevante, toutefois, cette «fin heureuse» racontée par un narrateur, qui passe mieux à l'écran qu'au théâtre et donne l'impression qu'on tourne les coins rond.

Mais qu'importe, puisque la foule était debout et que les comédiens ont été rappelés deux fois.

Disons simplement que le texte, pourtant assez récent, demeure très superficiel, si bien que les scènes de nudité voilée par des objets, les cris stridents et autres histoires de capotes pleines génèrent l'essentiel des esclaffes.

En sortant, les commentaires captés à chaud étaient assez positifs. Surtout venant de cette dame interviewée par une journaliste. «C'était excellent. On a ri! On voulait vraiment savoir comment les gars tout nus se sont retrouvés là!»

En effet, madame, excellent! Comment, au juste?

On a aimé

La beauté de l'endroit, avec un chapiteau, un petit bar et la proximité du Domaine Château Bromont - une belle option pour un quelconque forfait. 

On a moins aimé

La chaleur à l'intérieur de la salle et les sièges plutôt inconfortables et rapprochés, si bien qu'on joue un peu du coude avec les voisins.

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Au Théâtre Juste pour rire Bromont jusqu'au 27 août. Supplémentaires à la salle Pierre-Mercure, à Montréal, du 19 au 22 octobre.