Le théâtre d'été fait courir les foules. Au volant de sa Toyota Matrix, notre journaliste s'est faufilé dans quelques salles de l'extérieur de Montréal pour critiquer les pièces à l'affiche, décrire l'ambiance, voire le menu compris dans certains forfaits.

De la musique d'ambiance country émane du rustique Théâtre des Hirondelles, construit dans une sorte de grange en face d'un grand stationnement. Quelques centaines de personnes s'y étaient déplacées un mardi soir pour voir Les hors-la-loi, pièce mettant en vedette Émily Bégin, Véronique Claveau, Denis Houle, Jean L'Italien et Jérôme Roy.

Un western burlesque raconté, chanté, dansé, mais surtout efficace, qui raconte l'histoire d'un maire corrompu qui tente par tous les moyens de s'approprier un village du Far West, y compris le saloon d'une tenancière déterminée à sauver les meubles.

Mais avant d'aller plus loin, rappelons qu'au théâtre d'été, l'expérience commence bien souvent avant le lever du rideau. Dans notre cas, il débute à l'intérieur du bâtiment voisin, où l'on sert le souper compris dans notre forfait. Chemin faisant, on croise des golfeurs qui terminent leur ronde sur le parcours des Arpents verts.

Le grand restaurant est plein, les têtes sont blanches et la soupe aux choux dans laquelle on écrabouille des biscuits soda goûte le réconfort. Même chose pour le buffet, où l'on propose de l'émincé de poulet, des pâtes et une casserole de fruits de mer avec du riz jaune. Pour digérer avant la pièce, une jeune chansonnière enthousiaste fait danser le monde en ligne sur Achy Breaky Dance.

La salle d'environ 400 places est presque pleine.

Le rideau se lève sur l'intérieur d'un vieux saloon au bord de la faillite, appartenant à Maxime la tenancière (Dominique Pétin). Un décor franchement impressionnant, à des années-lumière de la pièce de boulevard qu'on imagine dans un théâtre d'été.

Entre en titubant l'ivrogne du village (Denis Houle), qui se précipite sur Mme Maxime. «Tu sens le citron! Tu me Pledge», lance-t-il, intoxiqué, en tentant sans succès d'embrasser la tenancière.

Denis Houle, que les enfants ont adoré dans son rôle de monsieur Craquepoutte dans l'émission Toc Toc Toc, se donne à fond, autant en alcoolo du village qu'en maire sans scrupule. Même chose avec Dominique Pétin, qu'on retrouve avec bonheur.

La foule éclate de rire. Le ton est donné. S'ensuivra une enfilade de jeux de mots, de personnages colorés (certains comédiens en jouent plusieurs), d'imbroglios et de situations burlesques.

Les blagues liées à l'actualité font mouche, et les chansons au piano du comédien Jérôme Roy (doué, il faut l'avouer) prennent beaucoup de place (un peu trop?) dans le spectacle.

En gros, la pièce raconte les machinations du perfide maire La Pomme (Régis de son prénom), qui tente par tous les moyens d'acheter toutes les propriétés du village pour les vendre à l'industriel Tex Aco, désireux d'exploiter le pétrole qui coule six pieds sous terre.

Mais comme un village gaulois, le saloon incarnera la résistance, notamment avec l'arrivée de deux artistes de french cancan Daisy et Butterscotch (Émily Bégin et Véronique Claveau), qui tenteront de sortir le bar du marasme à coup de chansons et de danses. «Pas de guidounes dans mon saloon!», leur lancera d'ailleurs la tenancière, avant de finalement leur donner une chance de se faire valoir.

Ajoutez à tout ça le curé caricaturalement efféminé Masturbin (Jean L'Italien, en jarretelles pis toute), Buddy, le shérif simple d'esprit, et un tueur à gages redoutable qui pisse plus vite que son ombre (Vessie James!), sans oublier quelques références à notre culture populaire, dont RBO. «Viens dans la cabane voir ma banane», minaude le shérif à une Mme Maxime dégoûtée.

La foule s'éclate, les calembours au premier degré s'enchaînent et ça fonctionne. Le côté «variété» permet une interaction efficace avec le public, qui chante et incarne en quelque sorte le public du saloon.

Évidemment, Émily Bégin et Véronique Claveau cadrent parfaitement dans ce concept de «bar académie», où elles poussent la note et ont du temps de glace pour démontrer leur savoir-faire.

Si bien qu'après un moment, l'histoire devient hautement secondaire, et tout le monde s'en moque.

En deuxième partie, l'histoire, de plus en plus décousue, reprend autour d'une élection et d'un «grand skouère danse».

«J'ai quand même pas fait pire que le maire de Laval town», lance, penaud, le vil maire destitué.

Le tout culmine évidemment avec un duel, une fin heureuse et Gangnam Style, avant une ovation debout prévisible, mais méritée.

Mention spéciale à cette dame assise dans la rangée d'en avant qui répétait systématiquement les derniers mots de chaque réplique en s'esclaffant ou cet homme derrière au rire gras tonitruant pendant que les filles dansaient sur Lady Marmalade.

Mais ils n'étaient pas les seuls à s'être amusés, puisque les membres du club de l'âge d'or de Montréal-Est se tapaient encore sur les cuisses en grimpant dans l'autobus scolaire garé devant le théâtre après la pièce. «Hey, c'tait bon, hen!», a lancé une dame, ravie, sans attendre de réponse.

À mesure qu'on s'éloignait dans le stationnement, la musique d'ambiance country du rustique Théâtre des Hirondelles s'évaporait tranquillement.

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Au Théâtre des Hirondelles de Saint-Mathieu-de-Beloeil jusqu'au 27 août.

On a aimé

Saluons le travail de la distribution, mais aussi de l'auteur Francis Vachon qui a osé s'éloigner des conventions pour relever d'un cran l'acidité des gags.

On a moins aimé

Des travaux dans le secteur de Saint-Mathieu-de-Beloeil forcent des détours susceptibles de vous faire sacrer. Vous voilà prévenus!