La populaire comédie musicale Mary Poppins, acclamée sur Broadway et qui arrive cet été à Montréal dans une adaptation du metteur en scène Serge Postigo, est un spectacle époustouflant et rassembleur. Critique d'une première médiatique fort attendue d'une production qui risque de faire courir les foules ces prochaines semaines.

Magique

Aussitôt arrivée dans la famille Banks, au moment où Mary Poppins rencontre Michael et Jane dans leur chambre à coucher, la magie opère. Comme dans le célèbre film de Disney sorti en 1964 (et inspiré du livre de Pamela L. Travers), la nouvelle nounou de la famille sort de son sac des objets bien trop grands pour tenir dans celui-ci. La surprise des enfants, partagée par le public, est contagieuse. On ne peut qu'être fébrile devant une mise en scène et une adaptation aussi soignées et réussies, annonciatrices de nombreuses surprises.

Un rythme rapide

Le rythme quelque peu rapide à laquelle l'histoire évolue donne parfois le tournis. La mythique chanson Jolie promenade est d'ailleurs quelque peu précipitée. Il est aussi décevant de constater qu'on ne montre pas les enfants sauter dans les portraits dessinés à la craie sur le trottoir, comme dans le film. Puis les éléments graphiques projetés sur un écran derrière la scène manquent de vigueur, un contraste avec le décor sinon grandiose. Toutefois, il est impossible de ne pas être émerveillé et tout souriant par les acrobaties et les danses des nombreux acteurs sur scène, tous plus talentueux les uns que les autres. On sent vraiment que le côté grandiose de Broadway atterrit rue Saint-Denis, surtout lorsque Mary Poppins revient auprès des enfants Banks en volant dans le théâtre accroché à son cerf-volant. Époustouflant!

Un décor ingénieux

Ce qui surprend le plus dans toute cette mouture québécoise de Mary Poppins, dont la version new-yorkaise a été primée Meilleure comédie musicale aux prestigieux Tony Awards, est la polyvalence des décors et l'ingéniosité avec laquelle ils sont brillamment utilisés. Les pièces se multiplient, les couleurs sont vives, les accessoires titillent l'oeil. Dans la scène où les enfants préparent un gâteau pour une réception, avec l'aide du majordome cabochon Robertson (dont la maladresse est un peu trop clownesque), la facilité avec laquelle Mary Poppins reprend la situation en main est une démonstration subtile mais convaincante du travail savamment accompli par l'équipe qui a conçu le spectacle.

Un son et une acoustique inégaux

Ça se voit: les acteurs de Mary Poppins sont bien préparés. Leurs prestations vocales et scéniques sont pratiquement sans failles. Or, on ne peut en dire autant du son et de l'acoustique, qui auraient besoin par moments d'un bon travail de précision. À cet égard, la production n'est pas au point. Le son est si fort qu'on ne distingue plus les mots qui sont chantés. Encore heureux que le public connaisse par coeur les magnifiques succès de Disney, car la finesse de la musique et des paroles se perd rapidement dans une cacophonie étourdissante.

Supercalifragilisticexpidélicieux

Malgré ces quelques bémols, Mary Poppins est un incontournable cet été pour tous ceux qui aiment les comédies musicales à grand déploiement. Histoire universellement aimée de toutes les générations, on prend plaisir à suivre Joëlle Lanctôt (qu'on se gardera de comparer à Julie Andrews, ce serait injuste), qui incarne avec justesse une Mary Poppins que l'on a tous déjà côtoyée dans le confort de notre salon. René Simard, qui joue M. Banks, tout comme Jean-François Poulin, qui interprète Bert, sont tous les deux impeccables, comme la plupart de membres de la troupe. Le plus grand moment du spectacle est évidemment Supercalifragilisticexpidélicieux, où le public s'est spontanément levé hier avec une vigueur rarement observée lors de premières médiatiques, applaudissant et chantant de bon coeur. Sans oublier bien sûr la danse des ramoneurs, où les mots nous manquent pour décrire l'ampleur de la scène. Une réussite qui vaut la peine d'être vue, au plaisir des petits comme des grands!