Extraordinaire, brillant, génial. Tous ces mots seront entendus dans les prochains jours pour décrire le spectacle Opus des Australiens de Circa à la TOHU. Pour une fois, c'est vrai!

Le Québec a le privilège d'abriter certaines des meilleures compagnies de cirque contemporain au monde. L'Australie aussi. Le spectacle Opus de la troupe Circa est ce qui se rapproche le plus - seul le temps pourrait le confirmer - de ce qu'on qualifierait éventuellement de chef-d'oeuvre d'art circassien.

Contrairement à ce que dit la publicité, toutefois, il ne s'agit pas d'un spectacle à couper le souffle ni d'une représentation à grand déploiement. Au contraire. Si on va au cirque pour les oh!, les ah! et les clowns, cet Opus est contre-indiqué. Tout autant si l'on déteste la musique de Chostakovitch.

Il s'agit d'un spectacle exceptionnel dans l'histoire du cirque parce que toutes les troupes tentent depuis 10 ans de fusionner l'art circassien aux autres, que ce soit la musique, le théâtre ou la danse. D'après ce que nous avons vu au fil du temps dans ce haut lieu du cirque mondial qu'est Montréal, Opus est tout simplement le spectacle qui le réussit le mieux.

Pratiquement sans faille, à part deux ou trois ralentissements de tempo, et d'une fluidité totale. Bienvenue dans le cirque fusion et... fusionnel!

L'approche est minimaliste. Le propos également. Le spectacle traite de la difficulté d'être un corps. Celui qui peine, lutte, chute, se relève, se joint à d'autres et triomphe par la force du groupe.

Apprivoiser la gravité



Opus n'est pas qu'une suite de numéros avec des points saillants spectaculaires. Tout, de la mise en scène aux éclairages, en passant par la performance 100% musicale du Quatuor Debussy, se fond dans un spectacle qui commence par une vague et se poursuit au gré des marées de corps brillants, pour ne pas dire célestes.

Les 14 magnifiques artistes de Circa se déploient essentiellement au sol sur une surface noire qui réfléchit leur image. La représentation s'élève rarement dans les airs - deux numéros de trapèze fixe et un autre de sangles aériennes -, préférant se servir de la gravité naturelle pour créer une incessante chorégraphie d'équilibre, de main à main et d'acrobaties.

Opus est fluidité, souplesse et force tranquille qui paraissent sans effort. Les chutes délibérées sont nombreuses, parfois violentes mais presque toutes silencieuses. Comme les culbutes, roues, plongeons et autres cascades.

Des actions ont souvent lieu simultanément au premier plan et à l'arrière avec un souci esthétique de tous les instants, duquel se dégage une véritable grâce évocatrice. Et, malgré toute apparence de simplicité, l'originalité et le degré de difficulté des actes circassiens sont très élevés.

Comme si, dans ce tableau constamment en mouvement, les 14 artistes puisaient une intelligence collective à même leur esprit de corps. Danse acrobatique, théâtre corporel, cirque poétique... les étiquettes ne servent plus à rien devant un tel objet artistique d'une touchante beauté.

À la TOHU jusqu'au 26 novembre.