Quelle belle initiative chez Duceppe de reprendre, pour son spectacle de fin d'année, L'esprit de famille, la comédie cinglante de l'auteur français Éric Assous, adaptée par Michel Tremblay et mise en scène par Monique Duceppe. Il s'agit de la même production que Jean-Bernard Hébert a présentée, en 2011, au Théâtre Rougemont.

Il s'agit donc d'une comédie de moeurs légère, avec des personnages typés et des situations loufoques. On ne réinvente pas Molière, mais on s'amuse et on peut apprécier le talent d'une distribution du tonnerre.

François, patron d'une boîte informatique, vient d'acheter une maison à la campagne avec sa conjointe. Il décide d'inviter ses deux frères avec leurs femmes pour pendre la crémaillère. La soirée s'annonce prévisible et longue. On sent que mis à part les liens familiaux, ces trois couples ont peu de choses en commun. Or, l'arrivée impromptue d'une invitée, une «bombe» sexuelle que les trois frères ont bien connue... va provoquer une onde de choc.

Devine qui vient dîner?

La pièce met un peu de temps à démarrer. L'auteur installe longuement la situation, qui est pourtant assez claire et limpide. Au bout de 40 minutes, Talia (Catherine Florent, très bonne) se pointe au milieu du repas. La belle célibataire va bousculer le fragile équilibre des couples. Le ton monte et l'action se corse. C'est à celui qui aura la réplique assassine, la révélation qui tue, qui donnera le coup de grâce...

Si les trois maris professionnels et assez beiges (Antoine Durand, Roger La Rue et Yves Bélanger) livrent une bonne performance, leurs épouses ont toutefois une meilleure partition entre les mains. Parce que leurs personnages sont plus colorés - la professeure frustrée (Linda Sorgini); l'agente immobilière parvenue (Anne Casabonne); la femme au foyer (très) naïve (Catherine-Anne Toupin). Et aussi, parce qu'elles sont sur le mode réaction et provoquent les situations alors que les hommes veulent seulement les désamorcer.

À lui seul, le jeu des interprètes des trois belles-soeurs vaut le déplacement chez Duceppe! Sorgini est au sommet de son art, livrant chacune de ses répliques avec aplomb et un timing parfait. Casabonne est irrésistible! Elle bouillonne comme une Italienne qui veut venger son honneur. Toupin est une reine du foyer drôle et éprouvée. Elle compose un personnage déjanté, très physique, qu'on croirait sorti d'une bédé.

À la tombée du rideau, le public les ovationne! L'esprit de famille fait mouche.

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Au Théâtre Jean-Duceppe, jusqu'au 8 février.