Sauf exception, la dernière journée du 27e Festival international de musique actuelle de Victoriaville n'a pas été la plus remarquable des quatre. Comme à chaque année au FIMAV, la rectitude politique des choix artistiques et le culte de la réputation l'ont emporté parfois sur la pertinence de certains projets suggérés dans la programmation.        

Prenons Comicoperando, concert de clôture présenté dimanche au Colisée des Bois-Francs en hommage à Robert Wyatt. Vu l'ambitieux corpus et l'alignement de pointures, ce ne fut pas à la hauteur de mes attentes.

La chanteuse Dagmar Krause, véritable mythe pour ces fans (un euphémisme) d'Amérique du Nord qui n'ont pu la voir sur scène qu'à de rares reprises depuis la grande époque (Slap Happy, Henri Cow, Art Bears), ne m'a pas toujours semblé en pleine possession de ses moyens - étrangement,  dans les séquences les plus douces au programme.

Karen Mantler, digne fille de Carla Bley (ressemblance... frappante!) et de Michael Mantler, aurait dû s'en tenir à l'orgue Hammond B3 et l'harmonica. Quant à la qualité de son chant, on repassera... Les musiciens de haute volée que sont Chris Cutler (batterie), Annie Whitehead (trombone), John Edwards (contrebasse) et Michel Delville (guitare) ont toutefois présenté de solides contributions à ces relectures de Robert Wyatt. Et dont le culte demeure vibrant, force était de constater au Colisée des Bois-Francs.

Plus tôt dans la soirée dominicale, la prestation offerte par l'altiste néerlandaise IG Henneman n'avait rien de marquant. Le système compositionnel de la musicienne et les interactions qu'il suscite m'ont laissé cette impression de relative austérité. De manque de relief. Je suppose qu'il faille y débusquer la matière dans la ténuité apparente de la facture, ce qui n'est peut-être pas évident en fin de festival.

En fin d'après-midi, le Hollandais Jaap Blonk nous a offert un divertissement haut de gamme. Ses exploration vocales et phonétiques résultent d'un travail fin et rigoureux, doublé d'un humour et d'une décontraction dignes des meilleurs stand-up comics. De la poésie dadaïste à la musique balinaise, l'univers de cet artiste m'est apparu vaste et d'autant plus riche.

Quant au projet 7K Oaks que mène le saxophoniste et multi-instrumentiste allemand Alfred 23 Hart (un des musiciens marquants à Victo... il y a deux décennies), on peut dire qu'il a réuni les caractéristiques convenues de la musique dite actuelle: environnements électroniques raffinés, moult niveaux d'intensité investis, solides improvisations en direct (Hart est un saxophoniste capable d'émettre un son musclé), piano d'un free assez prévisible (Luca Venitucci), drone de la basse électrique (Massimo Pupillo), percussions lourdes lorsque nécessaires Fabrizio Spera). Dans l'air du temps...

En ce qui a trait au concert solo de l'Allemand Peter Brötzmann présenté en début d'après-midi, il fut à mon sens inférieur à celui du trio incendiaire présenté la veille. Comme un seul homme, ce saxophoniste (et clarinettiste) d'expérience impose certes le respect du haut de ses 70 ans. On en observe néanmoins les limites relatives lorsqu'il se retrouve seul sur scène. On se rappelle alors que sa quête se fonde essentiellement sur les harmoniques graves et aiguës, sur la puissance de l'énoncé, sur les recherches de timbres dans les fréquences moyennes, sur les altérations furieuses du son. Intransigeant, radical, tempétueux, entier, fait d'un seul bloc.

On s'en reparle l'an prochain...