Cette pièce porte le sceau de l'Option-Théâtre du Collège Lionel-Groulx. Écrite par un ex-finissant, Nico Gagnon; mise en scène par un autre ex-finissant, Sébastien Gauthier, Roomtone a été créée pour la cohorte de 2009.

C'est le succès des huit représentations d'il y a deux ans qui a donné envie à Pierre Rousseau de programmer la pièce au Théâtre Denise-Pelletier. Avec les mêmes comédiens d'alors, qui ont sans doute pris de l'assurance.

En entrevue, Sébastien Gauthier soulignait le défi de créer une pièce pour 12 personnages, où le public n'aurait pas l'impression d'assister aux 10 minutes de gloire de chacun des finissants, mais à un «vrai show» avec des petits et grands rôles. Ce pari-là est réussi.

Comédie légère totalement assumée, bien rythmée, le texte de Nico Gagnon est d'une surprenante fluidité considérant le risque énorme de cacophonie découlant de l'interaction d'autant de comédiens en perpétuel déplacement. Certaines répliques nous ont paru un peu convenues, mais le suspense a été savamment planifié et s'avère extrêmement efficace. En vérité, tout l'intérêt de Roomtone est dans la forme, inspirée de pièces comme Cheech, dans leur déconstruction.

L'action se passe dans un petit restaurant de région géré par deux jeunes frères, Nicolas et Daniel, interprétés par Samuel Côté et David Leblanc. Durant la première partie, on nous raconte l'histoire du point de vue de la cuisine; la deuxième partie reprend l'histoire du début, mais du point de vue de la salle à manger.

Cette soirée improbable est évidemment assez éprouvante pour les deux frangins. D'abord, le groupe rock de l'heure, les Roomtone, débarque dans le resto, mené par le chanteur hyper chiant du groupe; ensuite, trois motards viennent récupérer l'emprunt fait en cachette par Daniel; tandis que l'ex-blonde de Nicolas (Kim), maintenant en couple avec un sexagénaire, fait son apparition...

Je ne vous révèle pas l'intrigue, ni ce qui lie chacun des personnages, mais c'est très bien ficelé et la fin, surprenante, pardonne les petites maladresses de parcours.

Lent à décoller

La première partie peine à décoller, et les personnages, motivés par le rythme accéléré de la vie en cuisine, en beurrent épais dans leur interprétation de serveurs «pressés» ou «débordés». Ils ont aussi la fâcheuse tendance à crier pour montrer leur impatience ou leur frustration, ce qui donne parfois lieu à des scènes caricaturales.

Seule Mary-Eve Fortier, dans le rôle de la plongeuse, parvient à nous distraire et nous faire rire durant les 45 premières minutes du spectacle. Gabriel Dagenais, dans le rôle du chef, arrive aussi à nuancer son jeu; en tout cas suffisamment pour nous faire avaler ses couleuvres...

Cela dit, cette première partie, ingrate, est aussi l'occasion pour le metteur en scène de glisser des indices essentiels à l'intrigue, qu'on ne peut malheureusement apprécier qu'après l'entracte. C'est vraiment là que le show prend son envol. Et que le succès mérité de la pièce prend son sens.

Nicolas Gendron, dans le rôle du chanteur détestable des Roomtone, est excellent. Idem pour François Morin qui compose un brillant motard (avec des tics superbes), secondé par Olivier Berthiaume, qui donne beaucoup de couleur à son personnage de colosse à la fois dangereux et hypersensible.

Geneviève Boivin-Roussy, dans le rôle de Kim, a une présence magnétique à la hauteur de son personnage qu'on a de la difficulté à mépriser, tandis que les deux frères se révèlent, eux aussi, plus intéressants. Dans les rôles plus secondaires, Audray Anna Demers est insupportable en groupie des Roomtone (elle est donc très bonne).

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Roomtone à la salle Fred-Barry du Théâtre Denise-Pelletier, jusqu'au 25 septembre.