L'acrobate, danseur et musicien montréalais Raphael Cruz, proche collaborateur des 7 doigts, est mort subitement la semaine dernière. Il se trouvait à Paris, où il répétait avec le chorégraphe et metteur en scène Philippe Decouflé. Il s'apprêtait à reprendre son rôle [comme danseur] dans le spectacle Nouvelles pièces courtes de la compagnie DCA.

La cause exacte de sa mort demeure inconnue. Il aurait été découvert sans vie dans sa chambre, mais sans aucune marque de violence, d'après ses proches. Une autopsie est actuellement en cours, un rapport policier aussi, nous a dit la cofondatrice des 7 doigts, Gypsy Snider, qui a appris la nouvelle du frère de Raphael, Francisco.

L'annonce de la mort de l'artiste âgé de 31 ans a eu l'effet d'une bombe dans le milieu du cirque. Une page Facebook «Remembering Raphael Cruz» a été créée par ses frères Francisco et Dominic, tous deux artistes de cirque. De nombreux témoignages d'amour et d'amitiés y ont été publiés.

Les 7 doigts lui ont également rendu hommage sur leur page, déplorant la mort «d'un «ami et d'un artiste précieux».

«Raphael symbolisait le coeur artistique de notre compagnie, qui met de l'avant l'expression dans l'acrobatie, nous a confié Gypsy Snider, ébranlée par la mort du jeune homme qu'elle a rencontré pour la première fois quand il avait 6 ans. C'était un garçon lumineux et charismatique, avec une joie de vivre extraordinaire», a-t-elle partagé les sanglots dans la voix.

Il faut savoir que Raphael Cruz, qui est né à Vallejo, en Californie, a fait ses débuts en cirque à l'âge de 11 ans avec le Pickle Family Circus de San Francisco, compagnie fondée par les parents de Gypsy Snider.

«Mes premières chorégraphies de cirque, je les aies faites avec lui, se rappelle Gypsy Snider. Il m'a beaucoup inspiré, parce que depuis son plus jeune âge, il faisait du cirque très contemporain, des acrobaties, du basket, du skateboard, du piano. À l'époque c'était inhabituel. Ce n'était pas des figures élégantes ou formelles. Et moi, j'ai adoré ça!»

De la Californie à Montréal

Gypsy Snider et Shana Carroll, qui venaient de cofonder les 7 doigts à Montréal [après avoir travaillé comme artistes avec le Cirque du Soleil], ont convaincu les frères Cruz de poursuivre leur formation à l'École nationale de cirque de Montréal. Ce qu'ils ont fait en présentant un numéro de main à main et d'anneaux chinois.

«À l'époque, ils hésitaient entre commencer à travailler ou s'inscrire dans une université, se rappelle Gypsy Snider. On leur a imprimé les demandes d'admission de l'École nationale et on les a vraiment encouragés à faire une carrière en cirque, parce qu'ils avaient vraiment du talent. Ils sont tous passés par Montréal, Francisco, Raphael et Dominic... »

Spécialisé dans les acrobaties chinoises (mât chinois, anneaux) Raphael Cruz a été embauché par les 7 doigts dès sa sortie de l'école (en 2005) dans la pièce Traces. Une tournée de près de cinq ans a suivi. On l'a aussi vu dans les pièces Intersection, La vie et Le murmure du coquelicot du collectif montréalais.

«Raphael, comme les frères Henderson [Devin et Brad], qui venaient eux aussi de San Francisco [que les 7 doigts ont plus tard recruté], faisaient partie de ces artistes de cirque qui ont incarné une nouvelle expression en cirque, qui allait au-delà de l'exécution d'un numéro d'adresse, insiste Gypsy Snider. Ils étaient capable de créer des chorégraphies autour du numéro, ce qui ne se faisait pas avant.»

Passage remarqué avec le Cirque du Soleil

En 2011, Raphael Cruz a été choisi par le chorégraphe français Philippe Decouflé, qui a mis en scène le spectacle Iris, du Cirque du Soleil, présenté à Los Angeles. Il a incarné le personnage de Buster Keaton, rôle qu'il a défendu pendant deux ans. Plus tard, il s'est joint à la distribution d'Amaluna - où il a incarné le rôle principal de Roméo.

Depuis quelque temps, il avait commencé à concevoir des spectacles - il a été l'assistant acrobatique de Shana Carroll sur les pièces Paramour et Crystal (du Cirque du Soleil, co-mis en scène par Sébastien Soldevila) et composé la musique de certaines pièces des 7 doigts (Réversible et Le murmure du coquelicot). Il avait aussi épaulé Sébastien Soldevila dans la création du premier segment des Cérémonies d'ouverture des Jeux de Sotchi.

«Raphael faisait partie du coeur des 7 doigts. C'était l'équivalent d'une muse pour nous. On comptait vraiment sur lui pour l'avenir de notre compagnie, a regretté Gypsy Snider. Sur le plan créatif, c'était quelqu'un d'extraordinaire et d'intègre, capable de jouer, de danser, de composer, de raconter des histoires avec émotion. C'est quelqu'un qui va beaucoup nous manquer.»