Comment donner une « saveur nouvelle » à une recette traditionnelle ? C'est la question que s'est posée le Cirque pour sa 41e production. En faisant appel au groupe électro M83 et en axant son contenu acrobatique sur les sports d'action, Volta se donne des airs de jeunesse, a constaté La Presse, qui a pu voir quelques extraits du spectacle présenté à partir du 20 avril.

Nouveaux visages

C'est le guide créatif du Cirque Jean-François Bouchard qui a fait appel à Jean Guibert et Bastien Alexandre pour diriger la création et faire la mise en scène de Volta. Les deux concepteurs, inconnus du grand public, ont travaillé en tandem sur le spectacle d'ouverture des Jeux panaméricains de 2015 à Toronto. C'est ce projet artistique qui a donné à la direction du Cirque l'intuition que les deux hommes - qui travaillent au Cirque depuis plus de 10 ans - étaient prêts à créer un spectacle sous chapiteau. « Quand on s'est lancé, on s'est littéralement lancé », a confié Bastien Alexandre, que Daniel Lamarre a qualifié d'« enfant du Cirque ». « On a fait un saut en parachute avec toute l'équipe de création ! C'était un peu le cri d'envoi du projet, on voulait que tout le monde se jette dans le vide avant de se mettre au travail. On rêvait de faire un show centré sur les sports d'action. »

Sports d'action

Corde à danser, vélo acrobatique, BMX, patins à roulettes, bungee, parkour, les sports d'action sont au coeur de Volta, qui comptera 46 artistes sur scène ! « Ce que j'aime, c'est la fougue des gens qui pratiquent ces sports-là, nous dit Bastien Alexandre, qui a commencé à travailler au Cirque en 2001 comme illustrateur. Il y a dans ces sports une urgence de vivre et une philosophie communautaire où les gens s'invitent à se dépasser mutuellement. Toute cette amplitude et cette vitesse qu'on va retrouver dans le chapiteau traduisent bien, selon nous, l'énergie qu'on veut communiquer. » 

Y a-t-il un risque de détourner le spectateur de la pièce en le plongeant dans un environnement trop « sportif » ? « Oui et non, répond Jean Guibert. Ce qui nous intéresse, c'est le désir de liberté de ces gens qui pratiquent ces sports extrêmes. L'absence de règles aussi. On veut insuffler cette énergie. Ce côté explorateur, on veut le montrer ! »

Une histoire de liberté

Volta met en scène un jeune animateur de jeu télévisé (Waz), qui vit dans un monde totalement superficiel dominé par un groupe appelé « les Élites ». « Waz est né avec des cheveux en plumes bleues, résume Bastien Alexandre. On peut penser qu'il a été ridiculisé dans sa jeunesse, il s'est paré d'une calotte d'or pour cacher ses cheveux et sa vraie nature. Cette calotte est devenue l'emblème du jeu télévisé qu'il anime. C'est devenu sa propre prison, où il offre aux participants de l'émission de cacher leur différence et leur peur d'exister. » La rencontre de Waz avec le personnage d'Ela - chef d'un groupe qui s'appelle les Esprits libres - marquera un tournant dans son parcours. « C'est une fille qui vit librement et qui ose être. C'est elle qui va le libérer de sa ‟condition" pour l'aider à s'accepter tel qu'il est et à tracer son propre chemin », nous disent les créateurs de Volta.

Musique contemporaine

« Le choix musical, plus contemporain, est un signal clair qu'on veut aller ailleurs », nous a confié le PDG du Cirque Daniel Lamarre. La trame sonore composée par Anthony Gonzalez, du groupe électro M83 (jouée live sur scène), crée en effet une ambiance tout à fait nouvelle, si l'on se fie aux quelques extraits entendus hier. Le musicien français, qui n'avait jamais collaboré avec le Cirque avant, s'est joint à l'équipe de Volta peu après la fin de la tournée de son album Junk. « Jean et Bastien ont trouvé les mots pour m'attirer dans ce projet, a-t-il confié à La Presse. La musique de Volta, c'est la musique de M83, avec beaucoup de synthé, mais aussi des cordes, ce qui tranche avec ce qu'a fait le Cirque par le passé. C'est de la musique électro, mais qui procurera beaucoup d'émotions, mélancolie, joie, tristesse. Je crois que les gens ont besoin d'évasion, et c'est ce qu'on propose. »

Adios, la mythologie du Cirque !

« L'esthétique du spectacle est nouvelle, insiste Jean Guibert. On voulait sortir des thèmes de la mythologie, des animaux et des croyances traditionnelles du Cirque pour vraiment embrasser une esthétique plus contemporaine, plus actuelle, même si ce n'est pas du tout réaliste. Ça se traduit dans les costumes, dans les projections vidéo, la musique, etc. » 

Le Cirque a également fait appel au scénographe américain Bruce Rodgers, qui a travaillé sur les 11 derniers spectacles de la mi-temps du Super Bowl et le show de tournée de Kanye West Watch the Throne. Rodgers, qui était de l'aventure des Jeux panaméricains, a voulu créer un environnement où l'action se déploierait rapidement, tout en charriant des émotions. « Le défi a été de créer un espace de jeu avec une scène de 41 pieds de diamètre, a-t-il soutenu. On a également intégré un cube mobile sur lequel il y a des projections, mais qui sert aussi de loge au personnage de Waz. »

Du 20 avril au 23 juillet sous le chapiteau du Cirque du Soleil, dans le Vieux-Port de Montréal

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Le directeur de création Jean Guibert travaille au Cirque depuis 10 ans, tandis que le metteur en scène Bastien Alexandre y est depuis 2001.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Le premier extrait présenté aux médias nous donne un aperçu du jeu télévisé animé par le personnage de Waz, sorte de «Voix » acrobatique où les concurrents se livrent une bataille à la corde à sauter.