Elle est Finlandaise, lui est Français. Les artistes  de cirque Kati Pikkarainen et Victor Cathala se sont spécialisés en main à main. Dès leur sortie de l'école,  ils ont aussi uni leur destinée. Ils sont à Montréal pour présenter leur spectacle Pour le meilleur et pour le pire, qui aborde directement leur vie à deux.

C'était en 1999. Autant dire le siècle dernier... Kati Pikkarainen avait 16 ans, Victor Cathala, 19 ans. Le contexte dans lequel ils se sont rencontrés est typique des écoles de cirque contemporain. La jeune Finlandaise parlait à peine l'anglais. Victor, jeune colosse toulousain, ne parlait que le français. Ils ont été formés par un Polonais.

« C'est sûr que c'était quand même particulier, se rappelle Victor Cathala. On se parlait avec des signes. Avec Kati, c'étaient nos corps qui se parlaient. C'était très fusionnel. On a été formés pour faire des figures acrobatiques de main à main. Malgré la barrière de la langue, on se comprenait tous assez bien. Par le geste. »

Mais la jeune femme n'était pas convaincue de vouloir former un duo avec son partenaire. « J'étais effrayée », concède-t-elle.

« Quand on forme un duo, on est très dépendant l'un de l'autre, on ne sait pas comment les choses vont évoluer. J'étais aussi jeune et timide, mais on nous a beaucoup encouragés à travailler ensemble, donc on s'est donné une chance. »

Après avoir terminé le programme de l'école de cirque de Rosny-sous-Bois, à Paris, ils ont poursuivi leur formation au réputé Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne. Pendant toutes ces années, leur relation est demeurée professionnelle. Jusqu'à la tournée du spectacle de fin d'année de l'École.

Qu'est-ce que ça a changé pour eux? « Moi, je pense qu'on s'est encore plus investis dans notre discipline, croit Victor Cathala, qui parle maintenant le finnois! Comme dans nos duos de main à main, notre relation amoureuse est devenue une recherche d'équilibre. On a eu envie d'explorer ce thème-là dans un spectacle qu'on voulait très proche de nous. »

C'est ainsi qu'est né Pour le meilleur et pour le pire en 2012. Un spectacle sans paroles joué près de 400 fois à ce jour, où les deux acrobates se révèlent petit à petit au public, dans leurs hauts et dans leurs bas. Kati, petit format d'à peine 100 lb, virevolte dans les bras de Victor, armoire à glace de 6 pi 2 po de plus de 230 lb !

« Que ce soit en cirque ou en amour, il y a une prise de risques qui est importante, note Victor Cathala. Notre spectacle démarre dans une atmosphère très colorée, très burlesque, et puis tranquillement, on découvre nos personnalités, on est beaucoup plus dans l'émotion. On est à fleur de peau, on rit, on pleure... Il y a une voiture sur scène qui est comme le troisième personnage et qui est une métaphore de notre vie de tournée. »

Bonheurs et défis

Comme d'autres duos d'artistes de cirque avant eux, leur « liaison amoureuse » est à la fois source de bonheur et de... défis.

« Le plus difficile est de trouver son individualité, son soi, analyse Kati Pikkarainen en français, parce que sur scène, comme dans la vie, c'est à deux qu'on existe. On ne peut pas facilement se ressourcer ailleurs, vivre autre chose et se retrouver, on est tout le temps ensemble ! D'une certaine manière, ça facilite les choses, mais nous ne sommes pas ensemble parce que c'est pratique. »

L'an dernier, une nouvelle surprise attendait le duo franco-finlandais: Kati a donné naissance à un petit garçon. Le couple d'acrobates a dû suspendre sa tournée.

« Je trouve que ça nous a fait du bien, raconte Victor Cathala. C'est comme si maintenant nous étions encore plus exigeants et rigoureux dans notre travail. »

« On s'est tous les deux tenus en forme pendant la grossesse de Kati et on a pu reprendre assez facilement l'entraînement après. C'est sûr qu'on a besoin d'une nounou pour nous aider au quotidien, mais on continue. C'est pas fini pour nous. »

Le défi des artistes de cirque est en effet de durer. Une carrière dépasse rarement les 15 ans, selon la discipline. Aujourd'hui âgé de 38 ans, Victor Cathala en est très conscient.

« C'est sûr que le corps évolue, mais on est moins dans l'acrobatie pure et dure, estime-t-il. On n'est pas juste là pour épater la galerie. On raconte aussi quelque chose, on dialogue avec le public. C'est plus narratif aussi comme spectacle. Honnêtement, je trouve ça beau, moi, un vieux forgeron. Avec le temps, il y a plus de finesse, de qualité et de justesse dans son geste. C'est un peu la même chose pour nous. »

Que feront-ils lorsque fiston devra aller à l'école? Silence. « On n'y pense pas encore, répond Victor prudemment. On ne s'en soucie pas trop. On sait qu'on veut d'autres enfants, donc on verra comment les choses évolueront. Dans notre prochain spectacle, il y aura d'autres interprètes, donc on ne se sent pas nécessairement obligés de toujours performer. On verra bien. »

Pour l'instant, le petit Cathala suit ses parents. C'est déjà un enfant de la balle. Espèrent-ils le voir un jour faire du cirque? « Il fera bien ce qu'il voudra, répond Victor Cathala. On ne va pas lui mettre le chapiteau autour du cou! Mais jusqu'à présent il adore la vie de cirque. Personnellement, je crois que c'est un mode d'expression intéressant. S'il veut un jour en faire, on ne l'empêchera pas. »

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Pour le meilleur et pour le pire sera présenté par le Cirque Aïtal du 7 au 17 juillet dans leur chapiteau planté sur le terrain extérieur de la TOHU.

Couples de cirque

On ne compte plus les couples dans le milieu du cirque tellement ils sont nombreux. Des artistes qui se sont connus à l'École, qui forment un duo, qui ont joué dans le même spectacle ou qui ont fondé une compagnie.

Parmi les artistes invités au festival Montréal Complètement cirque cet été, on compte au moins quatre autres couples:

Les quatre membres du Cirque Leroux sont en fait deux couples : Grégory Arsenal et Philip Rosenberg; Yannick Thomas et Lolita Costet. Ils présenteront The Elephant In The Room du 8 au 13 juillet au Théâtre Outremont.

Les deux clowns suisses de la compagnie Baccalà, Camilla Pessi et Simone Fassari, forment un couple. Leur spectacle Pss Pss sera présenté du 9 au 13 juillet au Quat'Sous.

Les fondateurs de la compagnie anglaise Gandini Juggling, Sean Gandini et Kati Ylä-Hokkala, forment eux aussi un couple. Ils présenteront leur nouvelle création 4X4 Ephemeral Architectures du 14 au 17 juillet au Théâtre Outremont.