C'est par un temps frisquet que le Cirque du Soleil a inauguré hier soir le nouvel amphithéâtre extérieur de Trois-Rivières, construit face au fleuve Saint-Laurent. Le spectacle hommage à Beau Dommage a démarré après de nombreux discours officiels devant plus de 3500 spectateurs, incluant les ex-membres du mythique groupe des années 70.

Le monde est fou s'est ouvert avec Le géant Beaupré duquel est justement tiré le titre du spectacle. Un premier tableau dansé avec une quinzaine d'interprètes réunis autour d'un personnage incarnant le célèbre géant muni de longues jambes de tissus. Une belle introduction suivie du Blues d'la métropole illustrée par des figures de mâts chinois. 

Un peu comme c'était le cas en 2010 avec la comédie musicale consacrée à Beau Dommage, c'est d'abord la musique du groupe qui domine et fait plaisir à entendre. La qualité des bandes originales donne vraiment l'impression d'être avec eux. Les arrangements de Jean-Phi Gonçalves sont subtiles, mais efficaces et rendent parfaitement les harmonies de voix qui ont fait les beaux jours du groupe.

Mais durant les premiers tableaux de ce spectacle de 75 minutes, on ne peut pas dire que le cirque réussit à se frayer un chemin audacieux au travers ces chansons qui célèbrent Montréal et qu'à peu près tous connaissent par coeur. On a plutôt l'impression d'une succession de tableaux impressionnistes qui accompagnent la musique sans jamais s'y frotter, suivant le modèle : une chanson, un habillage acrobatique.

Heureusement, le vent finit par tourner un peu en faveur du cirque, qui parvient à certains moments à faire corps avec la musique de Beau Dommage. C'était le plus grand défi de la troupe. La fusion est réussie avec la très belle Un incident à Bois-des-Filion chantée en duo où l'on assiste à un ballet aérien magnifique, qui se déplace au-dessus des spectateurs avec un numéro de cerceaux. 

Les duos sont particulièrement réussis. Que ce soit le duo de sangles aériennes sur la pièce Montréal ou le superbe duo au trapèze sur Harmonie du soir à Châteauguay, qui a déclenché la première véritable salve d'applaudissements. La chanson À toutes les fois chantée par Marie-Michèle Desrosiers était également magnifique, même si le numéro de trampomur n'était peut-être pas approprié.

Le spectacle a semblé vouloir décoller avec Le picbois, tous les acrobates participants à ce numéro sympathique où l'on retrouve sur scène un colosse (la véritable incarnation d'Édouard Beaupré!). Le décor de forêt amplifié par des miroirs installés à l'arrière scène promis par Geneviève Lizotte était ici parfaitement mis en scène par Jean-Guy Legault.

Ce sont ces tableaux qui ont réussi à créer une certaine ambiance dans ce très bel amphithéâtre rempli de fans qui ne demandaient qu'on les chauffe un peu. Un choeur d'enfants a également permis au Cirque de créer un peu de cette magie que le groupe Beau Dommage nous procure avec ses « chansonnettes » dixit Michel Rivard.

Malheureusement nous avons dû quitter avant la fin du spectacle - heure de tombée oblige - au moment où le rythme s'accélérait et où les éléments se mettaient en place, avec le retour de quelques notes du Géant Beaupré pour briser la linéarité des tableaux. Tant mieux, c'est prometteur pour la suite.

Le monde est fou est le premier de trois spectacles exclusifs que le Cirque s'est engagé à créer à l'amphithéâtre de Trois-Rivières au cours des trois prochains étés. D'ici là, on pourra voir le spectacle Toruk en décembre au Centre Bell de Montréal (inspiré du film Avatar) ainsi que le nouveau spectacle sous chapiteau du Cirque présenté à Montréal et Québec l'été prochain. 

Jusqu'au 15 août à l'amphithéâtre Cogeco de Trois-Rivières.