La nouvelle création des 7 doigts de la main, Séquence 8 - parce qu'ils sont huit sur scène et qu'il s'agit de leur huitième projet - sera présentée mercredi en première mondiale aux Nuits de Fourvière, à Lyon, puis à Montpellier, avant d'ouvrir le 3e festival Montréal Complètement cirque, le 5 juillet. La Presse a assisté à la dernière répétition de la troupe avant son départ pour la France.

Loft, Traces, PSY, La vie, l'univers intimiste des 7 doigts de la main se décline maintenant en plusieurs teintes. Mais l'esthétique de la troupe, elle, demeure la même. Et Sequence 8 en est la suite logique. Avec ce savant équilibre entre théâtre, humour et performance acrobatique. En plus des nombreuses chorégraphies de groupe, plus présentes que jamais.

Encore une fois, la pièce réunit sur scène de jeunes diplômés de l'École nationale de cirque de Montréal, une habitude pour la troupe des 7 doigts de la main, elle-même formée il y a 10 ans par des finissants de 2002. Cette fois, les huit artistes de cirque sont issus de la cohorte de 2011. Un groupe bien soudé, qui s'est vite trouvé des affinités avec les 7 doigts.

À l'été 2009, la troupe de cirque a créé de petits numéros acrobatiques dans le Vieux-Port de Montréal. C'est dans le cadre de cet événement (la Promenade des arts du cirque) que Shana Carroll et Sébastien Soldevila, deux des cofondateurs des 7 doigts qui enseignent aussi à l'École nationale de cirque, ont pris contact avec une poignée d'élèves de première année. Tout est parti de là.

«On a travaillé avec six d'entre eux, et ça été une expérience merveilleuse, raconte Shana Carroll, qui signe la mise en scène du spectacle avec Sébastien Soldevila. Évidemment, ils devaient terminer leur formation à l'École, mais on savait déjà qu'on voulait travailler avec eux.» Deux autres élèves (Devin Henderson et Colin Davis), originaires de San Francisco, se sont plus tard joints à la troupe. Le compte était bon.

Relations amicales

«Séquence 8 est peut-être le plus abstrait nos spectacles, estime Shana Carroll. On y aborde des thèmes comme la recherche de soi-même à travers les autres; la rencontre de gens différents qui nous emmènent ailleurs; notre connexion aux autres, parfois contraignante. C'est un spectacle qui explore les relations amicales avec beaucoup de tendresse. Il y a quelque chose de très charnel» indique-t-elle.

Le meilleur exemple est le numéro de planche sautoir de Maxime Laurin et Ugo Dario (médaillés d'or au dernier Festival mondial du Cirque de demain à Paris pour un autre numéro). Un duo extrêmement touchant. Vous en conviendrez, quand la planche sautoir vous émeut, c'est qu'il y a quelque chose de singulier qui se passe...

«Les arts du cirque sont une forme d'expression qui peut être très personnelle, nous dit encore Shana Carroll. Ce n'est pas une démonstration de virtuosité que l'on enrobe d'une mise en scène. On aime montrer l'artiste tel qu'il est. Sans le costumer. Nos mises en scène sont tellement personnalisées, qu'il devient extrêmement difficile de remplacer un interprète. C'est en même temps une force et une contrainte.»

Plus que les autres spectacles des 7 doigts, Séquence 8 (initialement baptisé Momentum) a été finement chorégraphié. «Il y a beaucoup d'énergie qui passe par la danse et les chorégraphies de groupe», admet Shana Carroll. Est-ce que son expérience de conceptrice dans le spectacle Iris, du Cirque du Soleil (mis en scène par le chorégraphe Philippe Decouflé), y est pour quelque chose? «C'est sûr qu'Iris m'a donné le goût de pousser plus loin le travail chorégraphique avec les 7 doigts», répond-elle.

Outre le numéro de planche sautoir, tout en subtilité, vous y verrez Eric Bates dans un impressionnant numéro de manipulation de boîtes de cigares; Maxime Laurin au trapèze; Alexandra Royer au cerceau et à la barre russe; Tristan Nielsen et Camille Legris dans un duo de main à main et de banquine et plusieurs chorégraphies de groupe, où chaque artiste est confronté à lui-même par un effet miroir, le thème de la pièce. Le tout est animé avec humour par Colin Davis, qui fait un charmant maître de piste.

«Dans tous nos spectacles, il y a une urgence de dire, de raconter, conclut Shana Carroll. J'ai été très influencée par une pièce de danse que j'ai vue il y a 20 ans. Ça s'appelait Episodes, du chorégraphe américain Ulysses Dove, qui a travaillé avec Alvin Ailey. Il disait avoir créé la pièce après la disparition d'un ami, mort du sida. Il s'était dit: «J'aurais aimé avoir deux minutes de plus pour lui dire des choses.» Son spectacle nous invitait à vivre à fond nos relations, pour ne jamais avoir besoin de ces deux minutes. Séquence 8, c'est un peu ça. Les 7 doigts aussi.»

Du 5 au 15 juillet à la Tohu, dans le cadre du festival Montréal Complètement cirque.