Le Cirque du Soleil sous chapiteau à l'île Seguin avec Corteo, Les 7 doigts de la main à la Villette avec La vie et Psy, Éloize au palais de Chaillot avec iD: partout, on joue à guichets fermés ou presque. Sur plus de deux mois, l'année 2011 se termine en apothéose pour le «nouveau cirque» québécois, devenu une référence mondiale.

Difficile ces jours-ci à Paris d'échapper au «nouveau cirque» québécois.

Les 7 doigts de la main ont ouvert le bal le 26 octobre au Cabaret sauvage (426 places) du parc de la Villette avec La vie, qui jouera jusqu'au 20 novembre, avant de céder la place à Psy, jusqu'au 30 décembre dans la Grande Halle voisine.

Le Cabaret sauvage était plein à craquer, samedi soir, et il y a «au moins 300 spectateurs les soirs de semaine», selon le directeur de tournée, Stéphane Beauchet. Surprise pour un «petit» cirque: Les 7 doigts ont eu droit à une page entière dans Le Monde du 31 octobre sous le titre «La troupe qui fait de l'ombre au Cirque du Soleil»!

Justement, l'armada du Cirque du Soleil a installé son chapiteau de 2700 places à l'ouest de la ville, sur les anciens terrains des usines Renault. Le Cirque y a entrepris, le 4 novembre, une série de quelque 80 représentations de Corteo, qui jouera jusqu'au 8 janvier.

Vendredi soir, le chapiteau affichait complet et le «rayonnant Cirque du Soleil» (dixit Les Échos), qui ne boxe pas dans la même catégorie, peut tabler sur plus de 160 000 spectateurs, avec des billets qui se vendent jusqu'à 185 euros (260 dollars)!

Pour compléter le tableau, le cirque Éloize, tout juste sorti d'une tournée glorieuse en Grande-Bretagne et en Suisse, fera son apparition le 24 décembre avec iD au prestigieux palais de Chaillot (1038 places), qu'il occupera jusqu'au 20 janvier. Selon le service de presse d'Éloize, «85% des places ont déjà été vendues».

Un triplé historique

Bien qu'un professionnel français reconnu comme Alain Pacherie - qui produit notamment le cirque de Pékin en décembre - considère volontiers la France comme une sorte de patrie historique pour le «nouveau» cirque, et qu'on annonce la présence de 14 troupes rien qu'à Paris pendant les Fêtes, les trois troupes québécoises sont déjà promises à un énorme succès public et à des spectacles à guichets fermés ou presque. Un impressionnant triplé qui prend des dimensions historiques.

Des succès qui sont parfois de nature très différente. Celui du Cirque du Soleil est quelque peu paradoxal. De l'avis même d'Adrian Gonzalez, son porte-parole, la France n'est pas son terrain favori parmi les grands pays européens.

«Nous nous installons chaque année à Londres, et tous les deux ans à Barcelone ou Amsterdam, indique-t-il. Nous n'en sommes qu'à notre quatrième visite à Paris en 20 ans. Il y a peut-être le fait que d'autres ''nouveaux cirques'' existaient déjà en France. De plus, contrairement aux autres grandes capitales, nous n'avons jamais trouvé de point de chute permanent à Paris, à une distance raisonnable du centre de la capitale. Il est possible que nous ayons trouvé la solution avec ce terrain de l'île Seguin, destiné à une future Cité des arts du cirque. Mais rien n'est encore définitif.»

Mais dans ce pays dont on dit qu'il «résiste» encore au rouleau compresseur du Cirque du Soleil, les 62 artistes et la centaine de techniciens de Corteo n'ont pas trop à se plaindre de l'accueil. Vendredi soir, le chapiteau faisait salle comble. Tous les grands médias nationaux étaient représentés.

Une légende à l'américaine

Pour les médias français, le Cirque du Soleil arrive précédé d'une formidable réputation: pour Télérama, c'est «la multinationale du spectacle». Pour Le Parisien, c'est «un phénomène... qui va vendre 14 millions de billets cette année». Bref, une légende à l'américaine.

Mardi soir, une bonne douzaine de stars du monde culturel ou sportif français seront à la première officielle de Corteo. La promo télévisuelle est déjà en marche, sur les principales chaînes de télé. Et, sauf surprise colossale, le taux d'occupation dépassera les 80% des places sous le chapiteau. Le Cirque du Soleil est une affaire mondiale... même en France.

Le parcours des deux autres cirques est bien différent. Dans le cas des 7 doigts de la main, La vie est accueilli davantage comme un spectacle à cheval sur le théâtre et le cabaret que comme du cirque proprement dit: scénarisation raffinée, humour noir, provocations, bande son très soignée. «Les spectateurs sont agréablement surpris. Y compris les enfants de 8 ans, ce pour quoi nous avons retiré la mention ''Déconseillé aux moins de 14 ans''», dit Nathalie Ridart, attachée de presse de la production.

Quant au cirque Éloize, il n'a guère besoin de faire ses preuves en France. Depuis 2004, il jouit d'une presse exceptionnelle. L'invitation qu'on lui a faite d'aller à l'illustre palais de Chaillot est une consécration en soi. Et une assurance de faire salle comble pour 25 spectacles.