Cet automne, un mastodonte tout neuf, à deux pas du métro Montmorency, promet de révolutionner l'offre culturelle dans la couronne nord de Montréal. La Place Bell, nouveau domicile permanent du club-école du Canadien, accueillera des dizaines de spectacles d'envergure tous les ans. Déjà au programme: The Killers, Scorpions, LCD Soundsystem ou encore alt-J. Le coup d'envoi sera donné le 13 septembre avec six représentations d'Ovo, du Cirque du Soleil.

La semaine dernière, Jacques Aubé, vice-président à la direction d'evenko, nous a ouvert les portes du complexe multifonctionnel, encore rythmé par le tapage de la machinerie lourde et jonché de matériaux de construction. S'il refuse de considérer la Place Bell comme un petit frère du célèbre centre homonyme, force est de constater certains airs de famille.

Loges d'artistes et d'affaires spacieuses, imposante galerie de presse, panneaux de recouvrement du parterre, disposition des concessions alimentaires: tout est à peu près calqué sur le Centre Bell. Lors de notre passage, des travailleurs s'appliquaient à élever le tableau indicateur central dans les hauteurs du colosse. «Là encore, il sera rétractable, commente Jacques Aubé. Pendant les spectacles, c'était important que la vue ne soit pas obstruée.»

Un lieu caméléon

L'équipe d'evenko, partenaire du projet avec la Ville de Laval depuis 2011, a toutefois voulu pousser un peu plus loin l'adaptabilité de la salle, grâce à des gradins télescopiques, à un pont roulant et à de minutieux effets de camouflage (rideaux, éclairage, etc.). Ainsi, selon sa disposition, l'amphithéâtre pourra accueillir convenablement une poignée de spectateurs pour des événements intimistes, et jusqu'à 10 000 pour des concerts grand public.

«Je tenais à ce que le parterre puisse accueillir 3000 personnes. Au Centre Bell, on est limité à 2200. On a dû ajuster les sorties de secours en conséquence. Pour certains shows, on pourra avoir de très bons partys au plancher», indique Jacques Aubé, vice-président à la direction d'evenko.

Rappelons une partie de la programmation: The Killers, Scorpions, alt-J, LCD Soundsystem... Pourquoi avoir choisi la Place plutôt que le Centre? Et pourquoi ces groupes précisément? Pour «tester la scène indie rock dans la couronne nord», un créneau idéal pour la taille du nouvel amphithéâtre, explique Nick Farkas, vice-président aux concerts et événements d'evenko.

«Dans certains cas, il s'agit simplement d'une question d'horaire, ajoute Jacques Aubé. Ici, on a plus de week-ends disponibles pendant la saison du Canadien. Si un band est à Toronto ou à New York le vendredi, c'est moins intéressant de lui proposer un dimanche ou un lundi au Centre Bell.»

Pour l'instant, une vingtaine d'événements culturels, dont des concerts, des conférences (Soyons la solution, animée par Chantal Lacroix) et des spectacles multimédias (L'univers de Marvel), figurent au calendrier. «On espère avoir de 40 à 50 dates pour la première année», dit Sandra Rinaldi, directrice marketing et relations publiques chez evenko.

Un nouveau marché

L'équipe de la programmation pourrait très bien suggérer à un artiste d'entamer sa tournée au Centre Bell et de la conclure à la Place Bell, ou inversement. Il faut dire qu'evenko travaille en terrain connu dans l'île Jésus, puisque le promoteur a organisé les concerts de LMFAO, Maroon 5 et Aerosmith au Centre de la nature de Laval.

«Pour que ce soit rentable et pour atteindre nos chiffres, il faut que les gens se déplacent de la Rive-Sud et de Montréal, convient Nick Farkas. Ces événements nous ont permis de constater que c'était le cas.»

«À Longueuil, j'aurais dit: attention, ça cannibalise les marchés, précise M. Aubé. Avec le Centre Bell qui est dans le sud de Montréal et la Place Bell qui est dans le sud de Laval, la situation géographique est idéale.»

evenko mise sur un réseau de diffusion toujours grandissant. «On a le Centre Bell, le M Telus [ex-Métropolis], L'Astral, le Théâtre Corona et le M2 [ex-Savoy], maintenant la Place Bell, et on aura d'autres annonces à faire bientôt», énumère le vice-président à la direction d'evenko.

«On aime se voir comme un club-école pour les artistes en pépinière. On cherche autant les petits bands que les gros. Pour un Bon Jovi, les agents à Los Angeles, New York ou Chicago ont huit petits artistes. On essaie d'établir une relation le plus tôt possible et de les voir grandir dans nos salles.»

En ce sens, l'ouverture de la Place Bell viendra boucler la boucle. «Il manquait une étape entre le M Telus ou la Place des Arts, par exemple, et le Centre Bell, résume le responsable de la programmation Nick Farkas. La Place Bell répond à ce besoin pour des concerts de 4000 à 6000 spectateurs. Avec un parterre plus grand, on souhaite aussi proposer une expérience différente pour les shows métal, rock et même hip-hop.»