Jean-Guy Moreau «a quitté la scène du théâtre de notre quotidien pour un show plus gros», ont annoncé, mardi, les trois enfants de l'imitateur québécois. Peut-être y retrouvera-t-il les René Lévesque et Jean Drapeau qu'il aimait tant imiter...

Hospitalisé depuis quelques jours, M. Moreau est décédé dans la nuit de lundi à mardi. Âgé de 68 ans, il avait dû récemment annuler des engagements pour des raisons de santé.

«On a fait trois spectacles en ligne à Longueuil, la semaine dernière, et quand je l'ai vu arriver la première journée, je lui ai demandé: »Est-ce que tu vas être capable de faire les trois spectacles en ligne?« Il était très, très, très fatigué. Très faible. Sa faiblesse tombait dans ses jambes», a raconté en entrevue son amie de longue date, la chanteuse Claire Pelletier, avec qui il était en tournée avec la revue musicale «Il était une fois... la boîte à chansons».

Né le 29 octobre 1943, Jean-Guy Moreau comptait plus de 50 ans de carrière dans le monde des variétés.

Il fait ses débuts en compagnie de Robert Charlebois dans les années 1960 dans le réseau des boîtes à chansons en faisant des imitations.

En 1965, il lance son premier disque, «Mes amis les Chansonniers?», toujours en collaboration avec Robert Charlebois, ainsi que Mouffe. Plus tard, il présente la revue humoristique du temps des Fêtes «Peuple à genoux», avec Charlebois, Mouffe, Louise Latraverse et Yvon Deschamps. En 1969, il lance les albums «Tsordaffaires» et «Alouette, je t'y plumeray!».

Dans les années 1970, il tient un rôle de composition au côté des Cyniques dans le film «Ixe-13», de Jacques Godbout. Il fera également de la télévision avec Clémence Desrochers, du théâtre, et livrera son premier spectacle solo à la Place des Arts, en 1974.

Ses talents d'imitateur ont été mis à profit, tout au long de sa carrière. En 1977, il lance le spectacle «Mon cher René, c'est à ton tour!», dans lequel il imite le chef du Parti québécois, René Lévesque. Le spectacle sera ensuite lancé sur disque avant d'être adapté pour la télévision. Bien plus tard, il présentera un spectacle en hommage à une autre de ses cibles favorites: l'ancien maire de Montréal, Jean Drapeau. «Le Retour de Jean-Drapeau» sera son dernier spectacle solo, en 2010.

«C'était un homme qui aimait l'humour de qualité, dans le sens où il ne sombrait jamais dans la vulgarité», s'est rappelée la ministre de la Culture, Christine St-Pierre, qui a souvent eu l'occasion de côtoyer l'imitateur lorsqu'il travaillait avec son conjoint, l'auteur Jean-Pierre Plante.

«Il était très attentif aussi à tout ce qui se passait en politique, bien sûr. Il aimait beaucoup traiter de la chose politique dans son humour et ça, c'était vraiment intéressant. Il était au courant de tout, il s'informait, il était aussi très volubile», a-t-elle ajouté.

«On perd une des voix qui faisaient qu'on avait une distance critique face à bien des personnages publics, a avancé pour sa part l'acteur et député indépendant Pierre Curzi. C'est ça que les humoristes font dans le meilleur des cas. Ils nous permettent d'avoir un recul. Et quand c'est fait avec talent, c'est à la fois réjouissant et intelligent en même temps. Ça nous aide.»

«C'est une triste année pour les clowns», a pour sa part souligné le fondateur du Festival Juste pour rire, Gilbert Rozon, faisant référence au décès récent de l'ex-Cynique Serge Grenier. Moreau et Grenier ont été les deux premiers animateurs de galas Juste pour rire dans les années 1980.

L'automne dernier, un bouquin sur la vie de l'imitateur, signé par sa fille Sophie, avait été publié aux éditions Michel Brûlé.

Par courriel, Michel Brûlé se rappelle le lancement du livre, qui lui avait permis de rencontrer Jean-Guy Moreau pour la première fois. «J'ai pris le micro pour le présenter et il a parlé avec son coeur de ce projet qu'il venait de réaliser avec Sophie. Tous ceux qui étaient présents ont été témoins d'une scène émouvante, celle de l'amour d'un père pour sa fille. Il a avoué humblement qu'il n'avait pas encore lu le texte de sa fille puisqu'il lui faisait entièrement confiance.»

Mardi, la chef du Parti québécois, Pauline Marois, s'est dite «profondément attristée par la disparition de ce grand de la scène culturelle québécoise».

«Des générations entières ont ri grâce à M. Moreau. Nous sommes tous un peu orphelins aujourd'hui», a déclaré Mme Marois par communiqué.

Le maire de Montréal, Gérald Tremblay, a quant à lui parlé d'«un grand artiste», qui «faisait partie de ces créateurs dont Montréal est si fière».

«Il était passionné dans tout. Il ne laissait rien au hasard. Il aimait les choses bien faites et ça paraissait dans tout ce qu'il a entrepris, dans ses spectacles», s'est souvenu Claire Pelletier.

Le musicien Jérôme Charlebois, fils de Robert Charlebois, a quant à lui tenu à rendre hommage à son parrain sur sa page Facebook: «Merci Jean-Guy au nom de tous tes copains d'abord qui te souhaitent le plus beau voyage», a-t-il écrit mardi.