Il n'y a rien de pire que le manque d'authenticité au théâtre. Il y a quatre ans, les six comédiens du Collectif numéro 7 sont tombés amoureux de Disparu(e)(s), texte sur le mal de vivre de jeunes Français de leur génération, dont la langue fulgurante et métaphorique est un défi à jouer. Ils se sont réunis et ont décidé de produire la pièce de Frédéric Sonntag sous la direction de Martin Faucher. On la présente ces jours-ci en accueil dans la grande salle du Théâtre Prospero.

Hélas! le résultat est loin d'être convaincant. Tant dans le jeu très appuyé que dans la mise en scène étourdissante, cette proposition du Collectif numéro 7 n'arrive jamais à nous faire pénétrer dans ce que M. Faucher a appelé «cet improbable ballet de banlieue glauque». Les comédiens parlent avec un accent français - il le faut pour ce texte -, mais ce n'est pas celui musical de la province, ni l'argot de banlieue, ni rien qui ressemble au langage de jeunes paumés... C'est un accent pointu et artificiel: celui de Québécois qui imitent mal de jeunes Français.

Dès lors, cette langue fausse et malhabile nous fait décrocher. Qui plus est, à l'exception de Julien Lemire qui incarne avec aplomb un travelo en manque d'amour, aucun acteur n'arrive à montrer l'âme ou l'intériorité de son personnage. Dans une pièce sur la soif de vivre et la quête d'absolu, manquer d'intériorité est un cruel handicap...

Génération désenchantée

Bien sûr, ici, on est loin du psychologisme. On est plutôt dans le romantisme, l'onirisme, le poétique. À partir d'un fait divers - une jeune fille disparaît dans le stationnement d'un centre commercial d'une banlieue reculée en France -, l'auteur évoque, avec une galerie de personnages de jeunes adultes en manque, une jeunesse sacrifiée qui flirte avec la mort et le danger pour échapper à la grisaille du quotidien.

Tout cela pourrait avoir de la grâce et de la beauté si la proposition était bien menée. Mais ce ballet métaphysique et urbain ressemble à une course folle et sans but. Les acteurs courent dans tous les sens sur le plateau vide de décor (on représente le stationnement avec un lampadaire au milieu). À tout moment, ils sortent et entrent côté cour ou jardin, claquent les portes des coulisses ou enjambent les escaliers dans les gradins...

Beaucoup de bruit (et de pas) pour rien. On aura vite oublié Disparu(e)(s).

Disparu(e)(s), au Théâtre Prospero jusqu'au 7 avril.