Certains artistes étrangers s'installent à Montréal pour la vie qu'on y mène, d'autres pour l'émulation. C'est le cas du danseur Frédéric Tavernini, 35 ans, né à Toulon et installé à Montréal avec femme et bébé à cause d'un nom: Dave St-Pierre, enfant terrible de la danse contemporaine québécoise.

Danseur de formation classique, diplômé de l'École de l'Opéra de Paris, Tavernini, un danseur de ballet défroqué qui a dansé pour Béjart et pour William Forsythe, se souvient encore de son premier spectacle de Dave St-Pierre en 2006. C'était à la salle Pierre Mercure. «Je me suis pris une porte en plein dans la gueule, dit-il. Je n'avais jamais vu un ballet aussi libre et aussi réel. Je me suis dit: "Ce type-là est un grand comme Béjart. Je dois à tout prix bosser avec lui."»

Ça tombait mal. La troupe de Dave St-Pierre était complète. Qu'à cela ne tienne. Tavernini a décidé que ça prendrait le temps que ça prendrait, mais qu'il y arriverait. Il avait déjà vécu à Montréal, entre 2000 et 2003, et dansé avec les Grands Ballets canadiens. «J'étais reparti parce que l'Europe ne manquait et parce que j'en avais marre de danser. J'ai pris un break de la danse pour installer des climatiseurs et rénover des salles de bains, mais j'ai toujours maintenu un lien avec Montréal, notamment grâce à la chorégraphe Danièle Desnoyers.»

En 2007, plus déterminé que jamais à danser avec Dave St-Pierre, Tavernini s'installe à Montréal avec sa copine. Le timing est parfait. Dave St-Pierre vient de se séparer d'un de ses danseurs et demande à Tavernini de le remplacer pour une semaine, puis pour une tournée en Europe. «Au Théâtre de la Ville à Paris, les gens nous ont fait six ou sept rappels. Parmi eux, il y avait mes copains de l'Opéra de Paris. Pour moi, c'était une douce vengeance puisqu'à l'Opéra de Paris, on m'avait dit que je ne serais jamais danseur. Dave m'a apporté beaucoup en m'ouvrant à un monde nouveau d'émotion et de démesure. Quant à Montréal, j'y ai trouvé une qualité de vie, la sérénité et de la place pour faire ce que j'ai envie de faire.»

Quand sa fille sera plus grande, Frédéric Tavernini se dit qu'il retournera peut-être en France. En attendant, il reste à Montréal pour Dave.