Créée à Québec il y a quatre ans, On achève bien les chevaux ne cesse de tourner autour de Montréal, sans jamais s'y arrêter. C'est chose faite depuis jeudi, puisque les 11 comédiens dirigés par Marie-Josée Bastien sont au Quat'Sous pour nous livrer ce marathon de danse inspiré du roman de l'Américain Horace McCoy.

Le but initial de Marie-Josée Bastien était de créer une pièce à mi-chemin entre la danse et le théâtre. Une sorte de théâtre du mouvement. Avec sa compagnie Les enfants terribles, elle a commencé à explorer ce filon, de connivence avec Harold Rhéaume et sa compagnie de danse Le fils d'Adrien.

Ne lui demandez pas exactement comment ni pourquoi, mais elle a pensé à ce roman d'Horace McCoy, They Shoot Horses, Don't They?, écrit dans les années 30, et adapté au cinéma par Sydney Pollack en 1969 - avec notamment Jane Fonda et Michael Sarrazin.

McCoy y raconte l'histoire de ces Américains frappés, comme des milliers d'autres, par la crise économique sans précédent des années 30. Et de la participation de nombre d'entre eux à un marathon de danse. Avec, bien sûr, une prime en argent pour les gagnants.

C'est le point de départ de Marie-Josée Bastien, qui a eu la bonne idée de transposer l'action à Québec. «Au fond, tout le monde a vécu la Grande dépression dans les années 30. Alors j'ai fait des recherches pour disséquer la faune de l'époque. Et j'ai repris l'idée du marathon de danse. Avec un prix de 1500$!»

Ces recherches l'amènent d'abord chez son oncle Jacques Lemieux, professeur d'histoire à la retraite, qui la renseigne sur le contexte économique et politique de ces années, fortement marquées par la contrebande. De fil en aiguille, elle rencontre, à Québec, une douzaine de personnes qui ont traversé la crise.

On achève bien les chevaux est le résultat de ces recherches et rencontres qui se sont étirées sur plusieurs mois. En un peu plus de deux heures, on y suit le parcours de cinq couples qui participent au marathon de danse, mince filet d'espoir qui les nourrit en cette période de vaches maigres. Le onzième personnage est l'animateur qui organise l'événement.

«Ces gens-là étaient en mode survie, dit la metteure en scène et comédienne. Et les marathons de danse pouvaient durer 25 ou 30 jours! La folie s'emparait d'eux. Ils ne dormaient pas. Ils prenaient des pauses de 15 minutes toutes les deux heures. Les gardiens les viraient à l'envers pour ne pas qu'ils s'endorment. Au fond, ces marathons de danse étaient amusants, mais ils étaient aussi d'une grande tristesse.»

Les comédiens interprètent chacun plusieurs personnages dans cette pièce-marathon (au sens propre) où ils dansent et bougent presque en permanence. La musique de Stéphane Caron et les costumes d'Isabelle Larivière recréent l'ambiance de ces années sombres.

«J'ai eu envie d'en faire une lecture moderne et de mettre en scène les participants dans un rave. Mais j'ai rapidement fait marche arrière. Je trouvais important de brosser un tableau de l'époque, avec le recul qu'on a aujourd'hui», résume Marie-Josée Bastien.

On achève bien les chevaux, au Quat'Sous jusqu'au 20 mars.