Leur cirque n'a pas l'extravagance de certains. Ils ne sont pas les plus poétiques, ni même les plus flyés ou délinquants. Ce qu'ils ont, ces fameux 7 doigts de la main qui font des ravages partout où ils laissent leurs traces, c'est un charme fou. Une énergie pure, contagieuse, qui est celle de leur jeunesse et de la chimie qui règne dans leur cellule.

Fouiller les zones d'ombre, les bibittes, les névroses et autres défaillances de la psyché, s'avère un terrain de jeu très riche, pour des créateurs de cirque. Et les Sept doigts s'emparent du sujet avec leur humour et candeur habituels.

Mais hélas, la prise de tête entraîne aussi parfois l'inertie. Nombreux sur la scène de la Tohu - ils sont 11- ils transforment leurs disciplines respectives en méthodes thérapeutiques pour surmonter des menues névroses et grandes angoisses.

Une agoraphobe (Danica Gagnon-Plamondon) surmonte sa phobie en s'élançant dans le vide à bord d'un trapèze, encouragée par ses pairs aussi déjantés qu'elle. Une insomniaque (Héloïse Bourgeois) trouve un apaisement dans la nuit auprès de son compagnon (William Underwood), dans un numéro de mât chinois tout en délicatesse et en sensualité.

Mais tout n'est pas parfait dans ce spectacle de plus de deux heures (avec entracte) qui souffre de temps morts et d'un côté un peu brouillon. Trop de temps passé à jongler des pensées sur le divan, plutôt qu'à s'élancer dans les airs, tourner dans la roue allemande (que Julien Silliau fait d'ailleurs admirablement), bref, faire du cirque.

Les relations qui se tissent entre les «patients» sont pourtant intéressantes à observer (notamment, dans des scènes de thérapies de groupe qui poussent les uns et les autres à se serrer dans les bras.) Mais l'énergie que l'on consacre à expliquer le thème, à souligner que l'un est dépendant, que l'autre est paranoïaque et que sa voisine souffre d'un problème de colère, alourdit le spectacle.

Autrement dit, on reste avec l'impression que les 7 doigts n'ont pas assez fait confiance à leur capacité d'évoquer, sans expliquer. Mais ils finissent par rattraper, et plutôt bien.

Dans la seconde portion de Psy, plus dynamique, plus harmonieuse et intéressante, les 7 doigts sont enfin à leur meilleur. Dans un numéro de planche-sautoir sur le thème des personnalités multiples, qui met en valeur l'unité du groupe. Des numéros de jonglerie sympas et habiles et des pas de danse joliment exécutés permettent de mieux lier les tableaux. Si seulement il y en avait plus...

L'exorcisme mental des 11 fous des 7 doigts est appuyé, il faut le dire, par une trame musicale vraiment exceptionnelle. Du charme, les 7 doigts n'en manquent pas. De l'intuition, de la créativité et du flair non plus. Seulement, on aurait voulu qu'ils sautent davantage sur le divan, plutôt que de s'en servir pour s'y épancher.

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Psy, spectacle cirque du collectif Les 7 doigts de la main, à la Tohu, jusqu'au samedi 6 mars.