La chorégraphe brésilienne, Deborah Colker, offre un bien joli cadeau de 25e anniversaire au Cirque du Soleil avec Ovo. Première femme à diriger un spectacle au Soleil, enfin! la dynamique artiste mise davantage sur la finesse que la force, le détail que le grandiloquent, le séduisant que le racoleur.

Connaisseur, le public montréalais a beaucoup apprécié, à entendre ses applaudissements spontanés et vibrants, la dextérité, la souplesse et la précision de ces acrobates, équilibristes et jongleurs qui ont appris à bouger, danser et exprimer des émotions aussi. Il y a peut-être moins de oh! et de ah! que dans certains autres spectacles du Cirque, mais Ovo gagne en homogénéité et en beauté.

Le ton en demi-teintes est donné dès l'éveil des insectes et leur chorégraphie au sol. Le premier numéro d'équilibre sur canne s'appelle «rosée». Gracieux et poétique.

La mince trame narrative s'installe avec l'arrivée d'une mouche inconnue dans cette joyeuse ruche. Différente elle-même, la coccinelle du groupe s'intéresse à l'iconoclaste et à son étrange ovo, oeuf en portugais.

Les fourmis suivent sur scène avec un très original numéro d'antipodisme où elles s'amusent à s'envoyer avec les pieds des tranches de kiwi et des épis de maïs. Après ce numéro au sol, Colker fait décoller l'action avec de magnifiques papillons à la corde lisse. Périlleux et sensuel!

La mise en scène est rigoureuse au point où chaque groupe d'insectes a son caractère propre, tant dans les costumes, géniale Liz Vandal, que dans la gestuelle. Par exemple, les sauterelles ne bougent pas comme les fourmis, qui sont plus besogneuses que les chenilles.

À ce sujet, l'une des plus belles trouvailles d'Ovo est d'ailleurs l'un de ses mille-pattes, sans queue ni tête, qui apparaît pour une chorégraphie hypnotisante. Bravo!

Le numéro de diabolos, jusqu'à quatre engins, est original et bien rythmé. Le jongleur a toutefois failli à trois occasions lors de l'avant-première médiatique.

La finale de la première partie, virile, met en scène une douzaine de voltigeurs qui virevoltent dans les airs. À couper le souffle.

Deuxième partie

La deuxième partie d'Ovo s'ouvre dans une toile d'araignée où d'imprudentes bestioles s'aventurent pendant que des contorsionnistes font des prouesses à l'avant-scène. L'une d'entre elles, moins filiforme que plusieurs dans ce domaine, démontre une flexibilité jusqu'au bout des orteils.

Le numéro d'acrosport est un autre moment fort d'Ovo. Les cinq artistes démontrent une grâce, une puissance et une précision de tout instant. Tonique.

Le même terme vaut pour la musique de Berna Ceppas. Le guitariste brésilien use de plusieurs rythmes de son pays - bossa, samba, forro - qu'il «funkifie» et «rockifie» au besoin. Les percussions triomphent. De l'excellent travail.

Mais le numéro préféré du public, avec raison, est celui du fil mou. L'équilibriste subjugue les spectateurs. Il garde un immobilisme total en se tenant sur les mains, une perche et un monocycle. Superbe.

Un bémol, cependant, les clowns. Ce qui faisait la magie du spectacle précédent, Kooza, brise ici le rythme du spectacle dans le dernier tiers temps. Le numéro s'étire un peu et certaines blagues grivoises ne cadrent pas avec le ton d'ensemble. La mise en scène gagnerait à être resserrée de ce côté en misant sur la belle scénographie de Gringo Cardia, justement sous-utilisée.

Par contre, la finale, trampolines et mur, devrait déjà figurer au panthéon des grands numéros du Cirque du Soleil. Pas tant pour sa puissance spectaculaire, encore une fois, mais pour sa merveilleuse mouvance constante. En hauteur, en largeur, en avant et arrière-scène. Un régal pour les yeux, les oreilles et le coeur.

Obrigado Deborah Colker!

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Ovo du Cirque du Soleil est présenté jusqu'au 19 juillet dans le Vieux-Port de Montréal.