À quelques mois du dépôt de la politique culturelle du Québec, les artistes chiffrent le réinvestissement qu'ils souhaitent: 1 milliard de plus d'ici trois ans.

«Les sommes investies dans les arts et en culture passeraient ainsi d'environ 1 % [du budget annuel du Québec] à 2 % », a expliqué hier Gilles Charland, directeur général de l'Alliance québécoise des techniciens et techniciennes de l'image et du son (AQTIS), membre du comité directeur de la coalition «La culture, le coeur du Québec».

Le regroupement a rencontré les fonctionnaires du ministère des Finances, vendredi dernier à Montréal, dans le cadre de rencontres prébudgétaires. Il a détaillé pendant plus d'une heure les besoins des créateurs. Il leur a notamment présenté une étude réalisée par deux économistes sur les besoins économiques pour le développement des arts.

«Consacrer 2 % des dépenses publiques à la culture, ça correspond à ce qu'on voit dans plusieurs pays européens, où la moyenne dépasse même cela», a affirmé à La Presse Pierre-Emmanuel Paradis, économiste et président d'AppEco, coauteur de l'étude.

Pour illustrer la «dégradation qui n'est pas anecdotique» des conditions de vie des artistes, M. Paradis rappelle qu'ils étaient environ 3,5 % à occuper au moins deux emplois en 1990, alors que la moyenne québécoise était légèrement au-dessus de 3 %. Depuis, l'écart s'est accentué: en 2016, alors qu'un peu moins de 5 % des travailleurs du Québec étaient dans cette situation, cela était le cas de près de 9 % des travailleurs culturels.

Dépôt après le budget

La ministre de la Culture, Marie Montpetit, a rencontré ces derniers mois plusieurs intervenants des industries culturelles et a affirmé qu'elle présenterait une politique rattachée à des mesures concrètes budgétées. Selon nos informations, cette politique culturelle, qui aura ainsi une première mise à jour depuis sa première adoption alors que Liza Frulla était ministre de la Culture il y a près de 25 ans, sera déposée après le dépôt du prochain budget.

«[Les artistes] ne seront pas déçus, ça va répondre à leurs besoins. C'est vraiment ça, l'objectif», avait dit Mme Montpetit en novembre dernier.

La semaine dernière, en point de presse, le premier ministre Philippe Couillard a affirmé que les reports successifs du dépôt de la politique culturelle ne signifient pas un manque d'intérêt de son administration.

«Pour moi, c'est excessivement important. Non pas parce que c'est ce qui exprime notre identité québécoise, mais personnellement, moi, j'ai eu la chance de baigner dans un milieu culturel très stimulant dans mon enfance et je sais à quel point ça m'a éclairé pour la suite des choses. Je veux que tous les enfants du Québec aient accès à la culture», a-t-il dit.

«La politique va être déposée et elle fera probablement l'objet d'une attention particulière du ministre des Finances lors de son budget. [...] Il y aura des mesures intéressantes là-dedans, surtout pour l'accès à la culture», a-t-il ajouté.

Pour marquer la rentrée parlementaire, les organismes culturels se sont donné rendez-vous le 14 février, à Québec. «Ce n'est pas un show de vedettes qu'on veut faire, c'est vraiment rassembler les organismes, le milieu» en amont du dépôt de la politique culturelle, a dit Gilles Charland, de l'AQTIS.