Quand Andrea Constand prendra la parole dans les prochains jours pour briser le silence qu'elle a gardé pendant une décennie à propos de son présumé agresseur, Bill Cosby, les jurés entendront la voix d'une femme qui voue sa vie à la famille et à son travail auprès de personnes atteintes du cancer en tant que massothérapeute.

La présumée victime canadienne sera le témoin-clé quand le procès du comédien surnommé «America's Dad» s'amorcera en banlieue de Philadelphie, lundi. Cosby est accusé d'avoir drogué et agressé sexuellement Andrea Constand.

L'accusé de 79 ans pourrait écoper de 10 ans d'emprisonnement s'il est reconnu coupable.

La dernière fois que Mme Constand a vu son agresseur allégué, c'était en 2004. Elle menait une carrière dans le basketball qui l'a emmenée à déménager des alentours de Toronto pour à un titre collégial avec l'Université d'Arizona. Elle a ensuite intégré une ligue professionnelle en Europe avant d'être embauchée comme entraîneuse à l'université Temple de Philadelphie.

C'est au sein de ce dernier établissement qu'elle a fait la rencontre de Cosby.

Mme Constand, aujourd'hui âgée de 44 ans, n'a jamais parlé publiquement de son présumé agresseur puisqu'elle devait se soumettre aux termes d'une entente confidentielle que Cosby et elle ont négociée en 2006.

La déposition qu'elle a faite pour sa poursuite a été placée sous scellé et n'a jamais été dévoilée.

Néanmoins, des amis de la présumée victime assurent que cette dernière est prête à faire face à Cosby de même qu'aux médias qui couvriront le procès.

«Andrea ne se concentre pas sur l'issue (du procès). Elle n'est pas émotive. Elle est tout le contraire. Elle est centrée (sur ses objectifs) et concentrée. Elle fait du yoga, elle médite», a dit Donna Motsinger, une autre plaignante de 75 ans contre Cosby qui est devenue proche de Mme Constand. Cette dernière a pris contact avec elle il y a deux ans.

«Elle vit une belle vie»

La plainte de Mme Constand est la seule à avoir mené au dépôt d'accusations criminelles. Une soixantaine de femmes ont accusé Cosby de faits similaires à ceux reprochés par la Canadienne.

«Elle est la seule qui a trouvé le courage de porter des accusations contre lui dans le cadre des limites imposées. Je ne pense pas que ce soit une coïncidence. Elle est tellement forte et courageuse», estime de son côté Lili Bernard, qui soutient que Cosby l'a agressée sexuellement. Celui-ci lui aurait ensuite donné un rôle pour une apparition dans son émission The Cosby Show en 1992.

C'est en 2002 que Cosby aurait scruté Mme Constand depuis le gymnase de l'Université Temple. L'un de ses amis lui aurait ensuite présenté la jeune femme. Lorsque celle-ci lui a mentionné qu'elle éprouvait des douleurs au dos, il l'aurait entraînée dans un vestiaire pour s'engager dans une séance d'étirements à deux, en position dos à dos.

Tous deux ont développé une relation amicale au cours des deux années qui ont suivi, parlant notamment de sport, d'astuces pour être en santé et de la carrière de Mme Constand.

Selon la déposition déposée en cour par Cosby, l'acteur américain a invité sa présumée victime dans un souper en compagnie de présidents d'un collège communautaire.

Cosby a qualifié certains des moments passés avec Mme Constand de «romantiques», décrivant quelques fois où il lui aurait fait des avances, notamment durant un séjour, en 2003, au complexe de casino Foxwoods, dans le Connecticut.

L'accusé insiste sur le fait qu'à son avis, les rapports sexuels qui se sont suivis - en 2004 - étaient de nature consensuelle.

L'avocate de Mme Constand estime qu'un tel axe de plaidoyer est ridicule, faisant valoir que Mme Constand, qui était âgée de 30 ans, fréquentait à l'époque une femme.

Mme Constand a quitté l'équipe de basketball de l'Université Temple à la fin de la saison 2004, retournant au Canada pour suivre les traces de son père en suivant une formation de massothérapeute.

Photo ARCHIVES PC

Andrea Constand en 1987, à Toronto.