En l'espace de trois heures, vendredi, trois événements ont réuni sur la scène montréalaise le politique, le financier et le culturel. Concentration assez rare pour que, au-delà des compte-rendu, on jette un coup d'oeil sur la gestuelle et le non-dit, sur le sous-texte et le texte aussi...

«Tsé monsieur/être réfugié/c'est du trouble en tabarnac parce que en plus de pas pouvoir sortir ses Air Miles/y faut rentrer sa maison dans un petit sac à dos/quand t'as déjà un kid dans chaque bras.»

La conférence de presse du Conseil des arts du Canada a commencé avec ces vers libres de l'humoriste et dramaturge beauceron Fabien Cloutier. Une idée de Simon Brault, chef de la direction du CAC qui avait convié les médias à l'annonce d'un programme culturel à l'intention des réfugiés syriens.

Cloutier, a-t-on expliqué, a fait paraître ce texte sur le site Poème sale après avoir écouté des tribunes téléphoniques où certains citoyens exprimaient leurs craintes devant l'arrivée massive de réfugiés «djihadisses».

Ces mêmes réfugiés à qui, dira la ministre du Patrimoine Mélanie Joly, on remet à leur arrivée une trousse «culturelle» contenant entre autres des ouvrages soumis aux derniers Prix littéraires du Gouverneur général... dont la pièce Pour réussir un poulet, du même Cloutier, finaliste de la catégorie Théâtre cette année. Disons que, pour cette oeuvre, les nouveaux arrivants auront besoin d'un traducteur au début...

Le plan du Conseil des arts du Canada, mis sur pied en trois semaines par Simon Brault avec la participation de la Financière Sun Life, est d'un autre ordre: avec de l'argent neuf, venu du Patrimoine, le CAC mettra à la disposition des organismes culturels une somme de 150 000 $, à laquelle Sun Life ajoute 50 000 $, pour donner aux réfugiés un accès gratuit à un spectacle, une exposition ou une activité culturelle dans leur communauté.

Selon Simon Brault, ces 200 000 $ permettront de distribuer environ 8000 billets d'entrée aux réfugiés, à travers le Canada.

Sans lancer d'appel direct, les créateurs du projet souhaitent voir d'autres corporations, autant locales que nationales, se joindre à cette action originale. «Un leader veut toujours voir ses actions imitées par d'autres», dira Isabelle Hudon, chef de la direction Québec de la Financière Sun Life, très active dans le champ culturel.

Mélanie Joly le sera aussi, elle qui semble déjà très à l'aise dans ses nouvelles fonctions. La ministre, vendredi matin, ressemblait à une étoile de la scène en tenue décontract', avec son veston ouvert et ses bottes à mi-cuisse. Ce qui nous a rappelé un article du National Post publié avant l'élection fédérale et où le paragraphe sur Mélanie Joly se terminait sur ces mots: «Potentiel de star: infini».

Vive Montréal! 

Plus tôt le matin, la Société des célébrations du 375e anniversaire de Montréal avait dévoilé au Musée des beaux-arts, devant ministres et présidents, la signature VIVEMONTRÉAL qui invite les Montréalais de fait et de coeur à célébrer la vivacité de la Métropole. Comme le fait d'ailleurs la vidéo promotionnelle endossée par la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain, Montréal International et Tourisme Montréal.

«Nous sommes au début d'un nouveau chapitre», a dit le maire Coderre en dévoilant ce «cri de raliement», VIVE MONTRÉAL! qui, les plus vieux s'en souviendront, a déjà été lancé du balcon de son hôtel de ville. Le 24 juillet 1967, Charles de Gaulle avait conclu son discours historique sur ces mêmes mots: «Vive Montréal!». Le président de la France, toutefois, avait ajouté «Vive le Québec! Vive le Québec... libre!»

Remous transatlantique... Aucune célébration n'a encore été annoncée pour souligner le 50e anniversaire du plus célèbre discours de l'histoire du Québec, qui coïncide avec le 50e d'Expo 67, l'ancêtre de Montréal International à bien des égards.

Entre-temps, dans la plus pure tradition des grands festivals montréalais, Gilbert Rozon, commissaire aux fêtes du 375e et toujours patron de Juste pour rire, a choisi l'étapisme médiatique pour l'annonce des grandes manifestations culturelles de 2017: deux par semaine pendant 19 semaines...

Vive Montréal!... et vivement la suite!

Quatorze mots

1) Raffinement. 2) Innovation. 3) Élégance. 4) Rencontre de l'Europe et de l'Amérique. 5) Créativité. 6) Spontanéité. 7) Bilinguisme. 8) Joie de vivre. 9) Qualité exceptionnelle. 10) Indépendance d'esprit. 11) Tradition. 12) Passion. 13) Tolérance. 14) Un certain tempérament.

Ces 14 mots définissent le Québec et sa «culture unique», a expliqué pour sa part Kent Nagano qui, avec «son» maire Coderre qui lui a fait l'accolade, était l'invité de la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain (CCMM), vendredi midi au Palais des congrès.

Dans les deux langues officielles, le directeur musical de l'OSM a livré d'intéressantes réflexions sur un thème récurrent: «La culture: pièce maîtresse du rayonnement international de Montréal».

Que l'OSM soit invité au Festival de Salzbourg, «la scène ultime de l'excellence musicale» (juillet 2016), est une marque de respect envers Montréal et l'ensemble du Québec, a soutenu Maestro Nagano. Il ajoutera que les festivals, et la culture en général, servent de catalyseurs aux transformations sociales, le tout débouchant sur la tolérance et la compréhension.

Et, on lui a fait dire, oui, l'argent est toujours le moteur des grands projets culturels, comme cette tournée américaine que l'OSM fera au printemps. Une occasion unique de faire découvrir Montréal et son orchestre tout en resserant les liens d'affaires, rappellera à ses membres Michel Leblanc, PDG de la CCMM: «Offrez des billets de concert de l'OSM à vos partenaires et clients de New York, Boston ou Chicago...»

Qu'attend Kent Nagano de cette tournée, la plus importante de l'OSM depuis 25 ans, lui a demandé La Presse? «Au-delà de la précision et de la technique, je m'attends à ce que les gens découvrent un grand orchestre et disent «Montréal, wow!»»

WowMontréal!