Hélène David est «furieuse» contre le Mouvement pour les arts et les lettres (MAL), qui l'a comparée vendredi aux conservateurs fédéraux. Elle juge que l'organisme a colporté un véritable «tissu de mensonges».

En entrevue avec La Presse, la ministre de la Culture a fortement réagi aux propos de Bastien Gilbert, porte-parole du MAL, qui a affirmé qu'elle avait fait preuve d'«une grande méconnaissance des effets des coupes sur les artistes» lors d'une rencontre qui s'est tenue avec le Ministère, jeudi.

«Hélène David sous-estime les conséquences des compressions sur les artistes. La défense du coeur créatif, au final, n'est pas une priorité pour elle», a affirmé M. Gilbert.

«C'est pourquoi on la compare à James Moore [ancien ministre du Patrimoine, à Ottawa]. Pendant son mandat, il a réussi à protéger le budget du Conseil des arts. [...] Si lui a réussi à le faire, au sein d'un gouvernement qui n'est pas très favorable aux arts et aux lettres, comment se fait-il que Mme David, dans un gouvernement qui est censé accorder une grande importance aux questions identitaires, puisse tolérer qu'on procède à de telles coupes ?», a-t-il ajouté.

Selon nos informations, cette déclaration, publiée vendredi après-midi sur le site de La Presse, a rapidement créé toute une polémique au cabinet de la ministre et au sein d'organismes représentés par le MAL.

«Il y a des limites à dire n'importe quoi. Lors de ma rencontre avec le MAL, nous avons vraiment travaillé en toute collégialité, dans un esprit de collaboration, le regard tourné vers l'avenir», a dit Hélène David, visiblement irritée.

«Je veux travailler avec [les représentants du MAL] et je compte bien les rencontrer à nouveau. Je pense avoir démontré [dans divers dossiers] que je peux travailler en collégialité. C'est ma façon de faire et je vais continuer à agir ainsi», a-t-elle poursuivi.

En fin d'après-midi, vendredi, le Mouvement pour les arts et les lettres a finalement publié un communiqué où il déplorait que sa position ait été résumée en ces termes par Bastien Gilbert.

«Le Mouvement tient à préciser qu'en rappelant que le budget du Conseil des arts du Canada - l'équivalent fédéral du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) - avait été épargné par les coupes fédérales, il n'a, à aucun moment, cherché à établir une comparaison sur la valeur des ministres ou des gouvernements du Québec ou du Canada ou à qualifier injustement l'ensemble du travail de la ministre David», a écrit l'organisme.

La Presse a tenté de parler avec des représentants du MAL qui étaient présents lors de la rencontre avec le ministère de la Culture, en vain. En début de soirée, France Bouffard, conseillère principale chez Sphère Communication, une firme de relations publiques, a précisé au nom du Mouvement que l'organisme ne donnerait aucune autre entrevue à ce sujet.

Les grands festivals victimes de compressions

La journée de vendredi a été particulièrement éprouvante pour la ministre Hélène David. En plus d'être comparée aux conservateurs fédéraux - ce qu'elle n'a pas pris comme un compliment -, elle a dû défendre de nouvelles coupes à la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), qui touchent cette fois les festivals majeurs des grands centres urbains.

Selon Martin Roy, directeur général du Regroupement des événements majeurs internationaux (RÉMI), les grands festivals de Montréal et Québec voient leurs fonds accordés par la SODEC fondre de 6 à 12 % cette année, alors que certains ont déjà mis un terme à leurs activités. Ainsi, le Festival international de jazz de Montréal, les FrancoFolies, le Festival d'été de Québec, le Festival Juste pour rire, le ComédiHa ! Fest-Québec et le festival Montréal en lumière sont touchés par ces nouvelles restrictions budgétaires.

«Le montage financier des grands festivals est très complexe et les fonds publics qui leur sont alloués relèvent de plusieurs ministères. En 2013, les membres du RÉMI ont eu un déficit moyen de 1,1 %. Je pense que c'est entre autres attribuable à des décisions comme celle-là, qui arrivent à la dernière minute», a affirmé M. Roy.

Du côté de la SODEC, on a refusé, vendredi, de confirmer ou d'infirmer ces nouvelles coupes. «Ces organisations n'ont toujours pas reçu la lettre officielle qui confirme les sommes [qui leur sont consenties]», a dit Fannie Sénéchal, directrice des communications.

La société d'État, tout comme le CALQ, s'est vu imposer une cure minceur à son budget aux opérations d'environ 3 %. Ces compressions budgétaires sont imposées à l'ensemble de l'appareil gouvernemental, expliquait récemment le ministère de la Culture.

En entrevue avec La Presse, vendredi, l'attaché de presse de la ministre David, Philip Proulx, nuançait ces plus récentes coupes. Face à ces restrictions budgétaires, d'autres ministères dégageraient de nouvelles sommes pour pallier le manque à gagner.

«Au final, sans m'avancer dans un pourcentage précis, c'est environ 10 000 $ qui sont retranchés dans leurs enveloppes respectives», a-t-il expliqué.