Nos journaliste ont pris des nouvelles des sept artistes de la relève qu'ils suivent pendant un an. Ils nous racontent leur mois d'août.

Sarah Bourdon: s'occuper pour calmer son impatience

Plus qu'une saison à patienter pour Sarah Bourdon, qui sortira son deuxième album au mois de janvier avec l'étiquette Audiogram.

L'auteure-compositrice-interprète en est aux dernières étapes de ce qu'elle prépare depuis des années. Sarah a vu les photos finales de la pochette - aujourd'hui chez le graphiste. Elle a entendu la version définitive de ses chansons après l'étape du «matriçage» (mastering) et elle discute d'un spectacle-lancement en janvier. «Je travaille aussi à un clip qui sortira en même temps que le premier single.»

Sarah planche sur le concept du clip avec la réalisatrice Geneviève Dulude-Decelles, qui a participé à La course Évasion autour du monde en 2011, et qui a remporté un prix au dernier Festival de Sundance avec son film La coupe dans la catégorie internationale du meilleur court métrage de fiction.

Tout cela anime l'esprit et remplit l'agenda de Sarah. Reste qu'elle doit patienter quatre mois plus longtemps que prévu, puisque son album devait sortir cet automne.

«Quand tu approches la trentaine, tu veux que ta carrière commence à marcher, car tu penses à des trucs comme fonder une famille. En attendant des résultats, il faut que tu gagnes ta vie. C'est beaucoup de questionnements. Est-ce que je me trouve une job de jour que je vais finir par lâcher avec les spectacles? Ma vie est comme sur hold.»

Si Sarah est «en attente», elle ne se tourne pas les pouces. La semaine prochaine, elle retournera en studio pour enregistrer des harmonies vocales sur le troisième album de compositions originales de Maxime Landry, réalisé par Scott Price.

Grâce à une discussion d'après-match de ligue de balle molle, Sarah Bourdon a également démarré un projet musical avec les chanteuses Ariane Brunet et Amylie. «Le projet s'appelle Garçons, indique-t-elle. La plupart des instrumentistes de groupes sont des gars. Notre concept est de montrer que les filles peuvent faire desjobs de gars. On va reprendre des chansons masculines. On a pensé à Plume Latraverse, par exemple... On choisit présentement les tounes et on devrait commencer à répéter bientôt.»

Sinon, Sarah a passé un bel été. Elle a assuré la première partie de son «idole» Daniel Bélanger, au Festival de la gibelotte de Sorel-Tracy. «C'était la deuxième fois que je cassais les tounes en formule acoustique avec un guitariste. J'ai vraiment senti une réception du public, dit-elle. Je vois déjà les chansons qui sont plus hooky (accrocheuses).»

Plus qu'une saison à attendre, donc, avant que les pièces de son deuxième album soient à la portée du public.

Même si «avoir beaucoup de temps, c'est parfois comme pas assez». - Émilie Côté

Daniel Clarke Bouchard: Sur scène avec Earth Wind & Fire

Daniel Clarke Bouchard ne s'est pas tourné les pouces cet été. Il a joué au Festival de jazz de Montréal, à Lachine, à Ottawa et à Stratford en Ontario, et même à Calgary. Il en a également profité pour préparer sa nouvelle saison de musique, sa tournée Scènes d'enfants qui se poursuit, un deuxième album à venir à une date indéterminée ainsi que son concert avec l'Orchestre symphonique de Montréal en février 2015. Il y a même dans l'air la possibilité d'enregistrer le pilote d'une émission de télé dont il serait l'animateur.

Il y a environ deux semaines, le téléphone a sonné à Saint-Lambert. C'était le célèbre groupe américain Earth Wind & Fire qui voulait que Daniel joue avec lui à Calgary le 20 août. Une invitation impossible à refuser: la mère du pianiste lui faisait souvent jouer la chanson Shining Star d'EWF quand il était tout petit.

Pourquoi Earth Wind & Fire a-t-il pensé à lui? Daniel et sa mère Valerie ont assisté au concert du groupe au dernier Festival de jazz de Montréal et ils ont rencontré le chanteur Philip Bailey dans sa loge. «Philip voulait m'entendre jouer, raconte Daniel. J'étais un peu surpris et je lui ai joué Ollie's Boogie-Woogie, que j'ai composée pour Oliver Jones.»

Daniel était tellement impressionné de rencontrer Bailey et ses camarades qu'il en était presque bouche bée, ce qui ne lui arrive pas très souvent, nous dit sa mère. Bailey, lui, a tellement aimé le jeu et la personnalité de Daniel que l'invitation à jouer avec Earth Wind & Fire est venue le mois suivant.

Le 20 août, donc, Philip Bailey a présenté Daniel au public de Calgary en disant qu'il l'avait vu à l'émission américaine Ellen avant de faire sa connaissance à Montréal. Daniel s'est installé au piano pour jouer les Variations brillantes de Chopin à ces fans de rhythm and blues, puis il a enchaîné avec l'intro de Fantasy, le succès d'EWF, avant que le groupe prenne la relève. Et à la fin du spectacle, c'est Daniel qui a salué le public en dernier.

«J'étais au septième ciel», dit le jeune pianiste, qui ira peut-être rejoindre ses nouveaux amis d'Earth Wind & Fire quand ils joueront à Londres prochainement. - Alain de Repentigny

PHOTO ALAIN DECARIE, LA PRESSE

Xavier Huard dans Cyrano de Bergerac

Lorsque le public se lève à la fin d'une représentation de Cyrano de Bergerac au Théâtre du Nouveau Monde pour applaudir la distribution, Xavier Huard a l'impression de vivre dans un rêve. Le comédien a la chance incroyable de jouer dans cette pièce qui a eu d'excellentes critiques et qui clôt aujourd'hui deux semaines de supplémentaires. Il ne pouvait demander mieux comme première expérience théâtrale professionnelle. De plus, il continue de tourner dans L'auberge du chien noir et dans la nouvelle télésérie Nouvelle adresse. - Véronique Lauzon

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

Kim Despatis: entre deux répétitions

Kim Despatis passera la majeure partie des prochaines semaines à l'intérieur d'une salle de répétition. Car l'actrice joue dans deux pièces d'affilée. D'abord, elle fera son premier spectacle solo au Prospero (du 26 septembre au 11 octobre), dans l'adaptation théâtrale du roman de Sophie Bienvenu Et au pire, on se mariera, signée Nicolas Gendron.

Puis, à la fin du mois d'octobre chez Duceppe, elle sera de la distribution d'Août-Un repas à la campagne de Jean-Marc Dalpé. Entourée, cette fois, des Monique Mercure, Michel Dumont, Pierrette Robitaille, Gilles Renaud... sous la direction de Martine Beaulne.

Lundi dernier, dans une salle sans fenêtres du sous-sol du Prospero, Kim répétait Aïcha, ce personnage beau et dur, fragile et violent; une femme-enfant élevée par une mère seule dans le Village, qui rêve d'un impossible amour avec un homme plus vieux.

Sous le regard avisé du metteur en scène et de son assistante, Mélanie Primeau, en short et t-shirt, Kim se lance dans son monologue-dialogue. Elle connaît déjà son texte (presque) par coeur, à un mois de la première. Nicolas Gendron intervient par moments, au milieu d'une envolée, pour lui donner ses indications.

Ce dernier produit aussi le spectacle avec la compagnie ExLibris. Gendron a offert le rôle à la comédienne après audition. Il connaissait Kim seulement pour l'avoir vue jouer au théâtre. Il ne doute pas une seconde que Kim peut rendre autant la gravité que la légèreté du personnage. «Aïcha est à la fois très lucide et très naïve. On ne sait pas toujours ce qui est vrai et ce qu'elle invente dans son histoire», résume le metteur en scène.

Comment Kim appréhende-t-elle le fait de porter sur ses épaules une pièce pendant 75 minutes? «C'est la chose la plus effrayante que j'ai faite de ma vie! C'est vertigineux! Mais le texte de Sophie est tellement bien écrit... Je m'appuie sur ses mots.»

La répétition se termine à 17h pile. Kim doit partir à la hâte. Elle va jouer un match de soccer au parc Marquette. Après le choc des mots, rien de mieux que de frapper le ballon et laisser rouler le stress! - Luc Boulanger

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Jimmy Gonzalez: rentrée tous azimuts

La rentrée automnale de l'artiste de cirque et danseur Jimmy Gonzalez a débuté la semaine dernière à New York, où il a travaillé pendant six mois dans le souper-spectacle Queen of the Night.

Cette fois, il fera un numéro de jonglerie au cabaret The Box, où il a déjà joué pendant l'été.

«Le format de ce cabaret fait en sorte que lorsque j'ai du temps libre, il est facile pour eux de m'insérer dans leur programme. On ira même jouer au cabaret The Box de Londres à l'automne. Ce n'est pas un spectacle mis en scène comme Queen of the Night, donc ils peuvent se permettre de faire tourner les artistes.»

Son aventure américaine, il la vit avec sa copine Érika Nguyen, spécialiste du cerceau et danseuse. Sitôt la halte new-yorkaise terminée, le couple s'en ira en Allemagne pour se joindre à la distribution de Little Big World.

«C'est drôle parce qu'on m'a demandé de remplacer le jongleur Stefan Sing, qui m'a beaucoup inspiré dans ma formation de jongleur. Le hasard a fait que sa femme avait aussi un numéro de danse, de sorte qu'Érika et moi allons les remplacer pendant un mois. »

Ainsi va la vie des artistes de cirque contractuels. Des rôles-titres de temps en temps avec des compagnies établies, mais surtout, beaucoup de remplacements très ponctuels qui les amènent un peu partout dans le monde.

«On reçoit quand même beaucoup d'offres, indique Jimmy Gonzalez. Le fait d'être diplômés de l'École nationale de cirque de Montréal nous aide énormément.»

En novembre, Jimmy Gonzalez et Érika Nguyen rentreront à Montréal, où ils feront une résidence dans le studio de création de l'École nationale de théâtre avec les danseurs de RUBBERBANDance. Ce sera aussi l'occasion de retravailler le spectacle de leur compagnie, Et des hommes et des femmes, Croisé.

«C'est sûr que notre objectif des deux prochaines années est de faire une tournée avec ce spectacle, nous dit Jimmy Gonzalez. On ne peut donc pas accepter trop de contrats. Peut-être qu'on fera un nouveau spectacle avec la compagnie, mais pas nécessairement avec les mêmes artistes.»

En marge du marché des arts de la scène CINAR, en novembre, Croisé sera d'ailleurs présenté à la Caserne Dalhousie du Cirque Éloize devant des diffuseurs. «On verra comment notre compagnie évolue, dit Jimmy Gonzalez. Notre objectif est aussi de faire du cirque et de la danse à Montréal.» - Jean Siag

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Éric Morin: droit devant

La dernière fois que je lui ai parlé, au début de l'été, il venait d'apprendre que son deuxième projet de long métrage, Gold, n'avait pas reçu le financement espéré de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), au volet indépendant.

Éric Morin ne s'est pas découragé. Et il semble aujourd'hui plus serein que jamais. Faire un film est un long processus. Il n'est pas dupe. Il a assez de métier comme réalisateur - il fut notamment à la barre de Mange ta ville à ARTV - pour savoir qu'il faut très souvent être patient avant d'être récompensé pour ses efforts.

«J'ai encore espoir de faire le film, dit-il. Et j'ai encore très envie de le faire. J'ai l'impression que tout ça fait partie d'un processus normal.» Morin en est d'ailleurs déjà à l'étape de la réécriture du scénario. «Je me suis inspiré des commentaires très précis des évaluateurs. Je vais retravailler le dénouement du film, les relations entre certains personnages. On m'a dit que je tenais un bon sujet, que le film s'inscrivait bien dans la continuité de ce que j'ai fait.»

Le cinéaste de Chasse au Godard d'Abbittibbi souhaite soumettre son scénario remanié le 15 octobre à la SODEC, même s'il est bien occupé par les temps qui courent. Ce ne sont pas les projets qui manquent, entre un film impressionniste sur l'Abitibi qui sera tourné sur quatre saisons, un projet avec le Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue piloté par des étudiants de l'Université du Québec et la télévision qui lui fait de l'oeil depuis Montréal. «On m'encourage à poursuivre mon parcours. Je suis d'accord avec ça!», dit-il, le sourire dans la voix. - Marc Cassivi

PHOTO ULYSSE LEMERISE, COLLABORATION SPCIALE

Julie Trudel: libre comme l'air à Berlin

Entrer dans une librairie, voir un livre dont on a beaucoup entendu parler, l'acheter et s'enfermer chez soi avec le bouquin pendant trois jours: voilà un des luxes que s'est payés la peintre Julie Trudel cet été à Berlin.

Le livre en question, A Blazing World de Siri Hustvedt, raconte la frustration d'une peintre new-yorkaise qui peine à obtenir de la reconnaissance pour son travail et qui en est réduite à vivre dans l'ombre de son mari, un illustre marchand d'art. Pour se venger de ce qu'elle considère comme de la misogynie culturelle, la peintre convainc trois hommes d'exposer ses oeuvres sous leur nom. Leurs expos, comme de raison, connaîtront un succès éclatant.

Julie Trudel a pu se payer le luxe de se perdre dans ce roman pendant des heures parce qu'elle est à Berlin pour faire de la recherche et se ressourcer, plutôt que pour produire. «C'est la liberté totale, m'annonce-t-elle au téléphone de Berlin. À un point tel que c'en est presque déroutant. Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas retrouvée sans deadline d'expo et avec tout le temps du monde pour réfléchir à la suite de mon travail.»

Julie quittera Berlin à la fin du mois, fera un détour par Montréal en septembre avant de partir de nouveau, cette fois pour Bordeaux où elle a obtenu une résidence. «La résidence dure deux mois et, à la fin, je dois produire une expo. À Berlin, j'en profite justement pour chercher des idées et de nouvelles pistes à explorer en prévision de cette nouvelle résidence.» En attendant, Julie se balade à vélo dans un Berlin chaud et verdoyant, visite des galeries et des musées et profite de ce qu'elle ne retrouvera pas de sitôt: sa liberté. - Nathalie petrowski

PHOTO ULYSSE LEMERISE, COLLABORATION SPCIALE