L'artiste, illustrateur et cinéaste Frédéric Back, créateur du film d'animation L'Homme qui plantait des arbres, est décédé mardi à l'âge de 89 ans.

L'artiste et environnementaliste, qui est né en 1924 en Allemagne et a grandi à Strasbourg, a étudié les arts et le dessin en France avant d'arriver au Canada en 1948. À cette époque, il est nommé professeur à l'École du Meuble, en remplacement de Paul-Emile Borduas, ainsi qu'à l'École des Beaux-Arts.

Dans les années 1950, Back est embauché à Radio-Canada, où il sera d'abord lettreur, puis illustrateur. Il agit ensuite à titre de caricaturiste à l'émission Le Nez de Cléopâtre et conçoit des décors pour la série Le Roman de la science, de Fernand Séguin.

En 1967, il signe la verrière de la station de métro Place-des-Arts, à Montréal.

S'intéressant au cinéma d'animation, il crée de nombreux films, dont plusieurs connaîtront un grand succès à l'étranger. Il reçoit une première mise en nomination aux Oscars en 1981, dans la catégorie du meilleur film d'animation, pour Tout-rien. L'année suivante, il est de nouveau en lice avec son film Crac!, pour lequel il remporte finalement la statuette dorée.

«Il est connu à travers le monde et a laissé un grand impact autant en animation que pour son message sur l'environnement, a affirmé à La Presse Phil Comeau réalisateur du documentaire Frédéric Back : Grandeur nature. Il faisait déjà du recyclage dans les années 60, il parlait de réchauffement climatique...il était un précurseur.»

Les convictions du cinéaste et militant écologiste ont certes teinté son plus grand succès en carrière, L'Homme qui plantait des arbres, inspiré d'un article de Jean Giono. Il a reçu pour cette oeuvre un deuxième Oscar, en 1987. Un quatrième de ses films sera lui aussi mis en nomination aux Oscars, soit Le Fleuve aux grandes eaux (1993), un hommage au Saint-Laurent.

Le grand respect que voue Frédéric Back à la nature ne se reflète pas que dans son oeuvre cinématographique. Le cinéaste n'hésite pas à s'engager dans les causes qui lui tiennent à coeur, notamment à titre de membre de la Société d'Eau Secours! pour vaincre la pollution et de la Société québécoise pour la défense des animaux.

«Il a planté des milliers d'arbres et a encouragé beaucoup de monde de tous les continents à faire de même, a indiqué M. Comeau. Ce qui me touche le plus est son approche positive, j'ai compris à travers lui qu'à partir du moment où tu aimes quelque chose tu vas vouloir te battre pour le protéger. Il pouvait voir une belle fleur et la regardait pendant 3 minutes, il était fasciné.»

Frédéric Back a été fait officier de l'Ordre du Canada, officier de l'ordre des Arts et Lettres de la France et chevalier de l'Ordre national du Québec, en plus d'avoir remporté le Prix du Gouverneur général pour les arts de la scène en 1994.

M. Back laisse dans le deuil, son épouse Ghylaine Paquin et ses trois enfants Christian, Süzel et Francis.

Dans les années 2000, Süzel Back-Drapeau, a participé à l'élaboration d'un site Internet, www.fredericback.com, visant à mettre en valeur le travail de son père et sur lequel se retrouvent près de 5000 oeuvres inédites.

Un homme «méticuleux» et «d'une grande générosité»

Frédéric Back a été décrit par plusieurs comme un grand créateur et un homme d'une grande générosité.

Le concert d'éloges est venu du cinéaste Phil Comeau mais aussi de Denis Chartrand qui a contribué au film L'Homme qui plantait des arbres à titre de compositeur musical. Joint par téléphone par La Presse Canadienne, il a parlé de M. Back comme étant un travailleur infatigable et un homme très généreux.

Il a travaillé pour la première fois avec l'artiste durant la production du film Crac, sorti en 1981. Bien qu'il ne faisait que collaborer avec le compositeur Normand Roger, son nom a figuré au générique.

«Frédéric, dans sa grande générosité, avait insisté pour mettre mon nom au générique», a-t-il confié.

«Lorsqu'il gagnait un prix, il redistribuait le montant gagné entre tous les collaborateurs. C'était un monsieur d'une grande générosité.»

M. Chartrand était impressionné par l'ardeur au travail du dessinateur.

«Il était méticuleux, c'était fou! Durant (la production de) «Le Fleuve aux grandes eaux», dans les dernières semaines, il dormait à Radio-Canada sous la table à dessin. (...) Il disait: «Si mon film réussit, c'est autant grâce à vous', mais il passait des années, lui, à dessiner, à concevoir tout ça.»

Des politiciens n'ont pas négligé de souligner la contribution de Frédéric Back, notamment Denis Coderre.

Sur Twitter, Denis Coderre a réagi. «Frédéric Back nous a quittés. Nous avons perdu un citoyen du monde. Nous sommes tous en deuil ce soir», a-t-il écrit avant d'offrir ses condoléances.

Le maire de Montréal a également tenu à saluer l'héritage du cinéaste d'animation, qui est né en Allemagne mais a évolué professionnellement à Montréal, après avoir traversé l'Atlantique pour rejoindre sa future femme, Ghylaine Paquin, une Québécoise.

«Il lègue un héritage riche en enseignement, en culture et en environnement, aux générations futures, a déclaré Denis Coderre par voie de communiqué. Avec son oeuvre éternelle, il a su évoquer avec justesse et émotion l'âme de la société qui l'a accueilli.»

Adressant ses condoléances à la famille Back, il a invité les Montréalais à admirer la verrière que M. Back a créée à la station de métro Place-des-Arts.

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, a également souligné son départ.

«Un grand artiste nous a quittés aujourd'hui. L'imaginaire de Frédéric Back restera à jamais gravé dans notre mémoire», a-t-il publié sur Twitter.

«Nous avons perdu un grand humaniste et écologiste. Merci pour tout», a pour sa part écrit le cofondateur d'Équiterre Steven Guilbault, également sur Twitter.

- Avec La Presse canadienne