Impossible de donner des concerts ? La violoniste Angèle Dubeau ne va pas ranger son archet pour autant. L’ensemble La Pietà et elle publieront trois disques cette année. Elle invite d’abord à plonger dans la musique « bienfaitrice » d’Immersion.

Avec la pandémie, Angèle Dubeau s’est retrouvée « aphone », comme elle dit : du jour au lendemain, elle n’a plus eu l’occasion de communiquer avec son public par l’entremise de son violon. L’énergique musicienne ne s’est toutefois pas laissé murer dans le silence bien longtemps.

En plus d’utiliser l’internet pour offrir de la musique aux mélomanes qui la suivent, elle a eu une idée un peu folle : donner des concerts avec La Pietà sur une scène flottante durant l’été. Elle a appelé ça Les dames du lac.

Les images montrent des gens en kayak ou en bateau écoutant attentivement les musiciennes, parfois un verre à la main dans ce cadre inusité. « C’était magique ! », s’exclame la violoniste, en se remémorant ces deux concerts offerts en juillet dans les Laurentides.

Se nourrir de liens réinventés avec l’auditoire, c’est bien, mais ça ne suffisait pas à Angèle Dubeau. Habituée à avoir une vie « réglée comme du papier à musique », elle a dû se trouver de nouveaux repères et revoir sa façon de fonctionner.

À la recherche du frisson

Son équilibre, elle l’a notamment retrouvé en passant des heures à écouter de la musique, à « butiner » comme elle dit, à la recherche du frisson qui lui donnerait envie de reprendre tel ou tel morceau. « Je carbure à la chair de poule, c’est aussi simple que ça », explique la musicienne.

« Ensuite, il faut que je sente que j’ai quelque chose de personnel à dire à travers cette musique-là, poursuit Angèle Dubeau. Je me demande : “Est-ce que mon violon, est-ce que nos violons peuvent donner à cette musique une relecture valable ?” » Si la réponse est oui, elle fonce.

Les musiciennes [de La Pietà] et moi, on se devine. On cherche toujours cette osmose. C’est ce qui fait qu’à un moment donné, on ne s’additionne plus, on se démultiplie.

Angèle Dubeau

Sur Immersion, elle revient à des compositeurs qu’elle a déjà fréquentés dans le passé comme Michael Nyman, Ludovico Einaudi ou Philip Glass. Elle propose aussi des morceaux d’Ólafur Arnalds, de Jonny Greenwood (tirés de la bande originale du film There Will Be Blood) et pas moins de trois compositions d’Armand Amar, son coup de foudre musical des derniers mois.

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Elle l’a découvert par hasard en écoutant du doudouk, sorte de hautbois emblématique de la musique arménienne. Elle a ensuite épluché le répertoire de ce prolifique compositeur, associé entre autres à plusieurs films de Costa-Gavras, et en a tiré quelques pépites.

Douceur bienfaisante

Ces trois morceaux, comme les autres choisis par Angèle Dubeau, sont empreints d’une douceur bienfaisante. Son violon survole avec grâce et une force délicate le souffle puissant de son ensemble. C’est enrobant et fort à la fois, rassurant et impressionniste aussi.

Avec le temps, Angèle Dubeau a appris à faire confiance à son instinct : ces besoins qu’elle comble à travers ses choix musicaux, ce qui la touche, elle, touchera forcément d’autres mélomanes, se dit-elle. Son succès prouve la justesse de son raisonnement depuis des années.

« Il n’y a pas de meilleure soupape à émotions que la musique. J’ai ce cadeau du ciel d’avoir appris la musique toute jeune, dit-elle. Je parle et je me parle avec mon instrument. […] Après, la force et la grandeur de la musique, c’est d’être capable de rejoindre l’auditeur. »

La relative douceur qu’on retrouve sur Immersion fait écho à ce qu’elle a ressenti au début de la pandémie. Mais elle n’en restera pas là. Si elle parle de ce disque-ci comme d’une « bulle » musicale, il en sera tout autrement des deux autres à paraître cette année. Après avoir repris son souffle, on ne doute pas un instant qu’elle aura repris tout un élan. À suivre d’ici l’automne.

IMAGE TIRÉE DU SITE INTERNET D’ANGÈLE DUBEAU

Immersion, d’Angèle Dubeau

Musique classique
Immersion
Angèle Dubeau & La Pietà
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