Renaud Loranger porte le Festival de Lanaudière dans son cœur. Là où la musique classique occupe une place de premier choix. Devenu directeur artistique de l’événement, il souhaite faire partager sa passion pour les concerts exceptionnels donnés à Joliette et dans les environs.

« J’en ai un souvenir impeccable. Je l’entends, je la vois, je me rappelle ce qu’elle portait. C’était un concert absolument grandiose. »

Ce concert, c’est celui qu’a donné Magdalena Kožená à Joliette au début du millénaire.

Renaud Loranger avait 14 ans, et la mezzo-soprano tchèque « était sur le point de devenir une supervedette ». Elle jouait avec Les Violons du Roy de Bernard Labadie. Et Renaud Loranger ne l’a jamais oubliée.

Deux décennies plus tard, leurs routes se sont recroisées. Ce mois-ci, Magdalena Kožená a sorti l’album Il giardino dei sospiri sous étiquette Pentatone. Un label sis aux Pays-Bas dont Renaud Loranger est également vice-président artistes et répertoires.

Depuis peu, le Québécois trentenaire assure la direction artistique du Festival de Lanaudière. Un festival qui l’a marqué, adolescent. Ce « p’tit-gars-de-Joliette-né-à-Montréal », que « rien ne prédestinait à travailler en musique », y a vu moult concerts classiques. « Je ne m’en rendais pas nécessairement compte à l’époque, mais aujourd’hui, je sais que le Festival a joué pour moi un rôle fondamental. »

Des premières à Lanaudière

Si l’on regarde sur papier la programmation de cette année — la première avec Renaud Loranger à sa barre —, on trouve également plusieurs premières. Comme celle, québécoise, de Seong-Jin Cho, musicien sud-coréen que le directeur artistique a découvert en 2015, à Varsovie, au Concours international de piano Frédéric-Chopin (ou, comme il surnomme l’événement, « les Olympiques du piano »).

Loranger travaillait alors pour la maison de disques renommée Deutsche Grammophon. Et son label allait enregistrer le lauréat de la compétition. « Charles Richard-Hamelin a terminé deuxième — il s’en est fallu de peu que j’enregistre mon compatriote joliettain ! »

Seong-Jin Cho a été sacré premier. « Depuis, sa carrière a explosé, mais explosé ! C’est un musicien magnifique, parfait sur le plan technique, très versé dans le répertoire allemand. »

Au Festival, l’artiste de 24 ans jouera d’ailleurs, sous la direction de Yannick Nézet-Séguin, un concerto de Beethoven. « Le quatrième, qui n’est vraiment pas le plus simple sur le plan interprétatif. »

Pas simple non plus de créer l’équilibre quand on monte la programmation d’un tel rassemblement. Mais Renaud Loranger et son équipe ont misé sur une palette inspirée.

« On présente de la musique contemporaine, dont le troisième concerto pour piano de Philip Glass, qui a été écrit il y a quoi ? Deux ans à peine ? Et puis de la musique symphonique, lyrique, de chambre… »

Sans oublier des œuvres qui seront jouées pour la première fois dans le cadre du Festival. Dont la symphonie no 7 de Bruckner « qui tenait beaucoup à cœur au père Lindsay ». Trois concerts seront d’ailleurs dédiés au regretté fondateur de l’événement, mort il y a 10 ans. Notamment celui du ténor américain Michael Spyres. « Une voix aux capacités inouïes ! L’une des plus importantes de notre époque. »

Salutations distinguées

Renaud Loranger, qui a étudié en sciences pures au cégep et en musicologie à l’Université de Montréal, est un homme d’échanges et d’idées. S’il ne joue plus trop de piano (« Mais si vous me donnez une partition, je saurai la lire »), on sent qu’il a un respect infini pour le travail des artistes. Par exemple, quand il parle de Marc-André Hamelin, « l’un des plus grands pianistes du monde ! », ou de l’Orchestre baroque de Venise, « la Rolls-Royce des orchestres baroques ».

« Les artistes sont des gens très sensibles, qui font des choses extraordinaires, qui nous inspirent. Le succès d’un festival est basé sur la confiance que l’on établit avec eux, avec leur entourage, avec leurs agents. »

Dans ce domaine, Renaud Loranger semble se distinguer. « J’ai la chance de connaître beaucoup de monde, les conversations sont faciles à initier. C’est comme une roue qui tourne, qui tourne. On discute sans arrêt jusqu’au moment où on fait : “OK, super, magnifique idée.” »

S’il y a par contre une chose que le directeur artistique espère que les gens ne diront pas, c’est que la musique classique n’est pas pour eux. « Ce n’est pas pour être ésotérique, mais la musique, c’est ici et maintenant, prévient-il. Ça nous aide à grandir, à mieux nous connaître, à réfléchir à l’essence de l’expérience humaine. À devenir plus tolérant. Plus sage. »

Sage… mais pas trop. « Lanaudière, c’est génial ! s’exclame-t-il spontanément. Il faut y aller ! Alors, go ! »

Le Festival de Lanaudière se déroule du 5 juillet au 4 août.

Consultez le site du festival : http://www2.lanaudiere.org/fr/