Les héritiers d'Alexandre Benois, collaborateur de Maurice Ravel, ont annoncé avoir engagé une procédure judiciaire contre la Sacem pour faire reconnaître leur aïeul comme coauteur du célébrissime Boléro du compositeur français, dans un communiqué obtenu mardi par l'AFP.

La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) avait refusé à deux reprises ces dernières années de reconnaître Alexandre Benois, influent peintre et décorateur russe, comme coauteur de ce succès aujourd'hui planétaire.

Le Boléro, qui a dernièrement été joué aux commémorations du centenaire de l'armistice du 11-Novembre, est tombé le 1er mai 2016 dans le domaine public en France, ce que contestent les cinq ayants droit de M. Benois.

Ils estiment notamment que le Boléro est à l'origine la musique d'un ballet portant le même nom créé à l'Opéra de Paris en 1928. C'est une «oeuvre de collaboration entre Ravel et Benois», affirme à l'AFP François Tcherkessoff, arrière-petit-fils du décorateur, qui avait fait notamment le décor et les costumes.

Les ayants droit estiment que «les preuves de la participation d'A. Benois à la création du ballet sont suffisamment nombreuses et concordantes, et que la Sacem a manqué d'impartialité lors de l'examen du dossier».

«Pour ces raisons, ils ont engagé une procédure en responsabilité à l'encontre de la Sacem devant le Tribunal de Grande Instance de Nanterre», ajoute le communiqué. L'assignation a été enregistrée le 3 juillet et une audience de procédure est prévue le 18 février 2019.

Si cette démarche aboutissait, elle repousserait la date de l'entrée de l'oeuvre dans le domaine public à 2039, M. Benois étant décédé en 1960.

De son côté, l'avocat de la succession de Ravel a indiqué avoir été assigné et être donc partie à cette procédure, mais a souligné ne pas en être à l'origine.

Réfutant tout «a priori» dans ce dossier, le secrétaire général de la Sacem, David El Sayegh, a déclaré mardi à l'AFP que la «communauté d'inspiration entre Ravel et Benois au titre d'une composition musicale» n'avait jusqu'ici pas été «démontrée» par les héritiers.

Il a indiqué que la Sacem était «très sereine» par rapport à cette procédure judiciaire.

De son côté, M. Tcherkessoff avait dans le passé fait état de «documents historiques», dont des déclarations de Louis Laloy, secrétaire général de l'Opéra de Paris, qui écrit dans Le Figaro du 21 novembre 1928, qu'Alexandre Benois était l'«auteur» des trois spectacles, dont le Boléro, donnés à l'Opéra le soir du 22 novembre.

Composée en 1928 et créée le 22 novembre de la même année à l'Opéra Garnier à Paris, l'oeuvre symphonique est, à l'origine, une musique de ballet.

Salué par la critique, le Boléro connaîtra rapidement un succès planétaire, même si sa mélodie uniforme et son rythme répétitif en crescendo ont dérouté plus d'un mélomane.