À l'époque où il travaillait à Paris, et surtout à la grande époque Barclay (1966-1975), Jean-Pierre Ferland a souvent enregistré avec de grands ensembles, mais jamais, là-bas ou ici, avec un orchestre symphonique.

À la scène, le chansonnier s'est produit une fois avec «la totale», en clôture du Mondial choral de Laval de 2005, selon nos recherches, avec l'Orchestre symphonique de Laval que dirigeait Simon Leclerc. Le même Leclerc qui sera au pupitre de l'OSM mardi, mercredi et jeudi prochains à la Maison symphonique pour le concert Ferland - Un 80e anniversaire symphonique.

Eh oui! Dans l'irréversible mathématique de la vie, Jean-Pierre Ferland est entré dans sa 81e année le 24 juin 2014. Les célébrations du 80e anniversaire peuvent donc se poursuivre, sans déborder du concept, jusqu'à la Saint-Jean-Baptiste de cette année.

«L'OSM, c'est un beau cadeau, comme travailler avec Simon et chanter avec Florence», nous disait M. Ferland, rencontré la semaine dernière dans le salon d'honneur de la Maison symphonique en compagnie de Simon Leclerc et de Florence K qui assurera la première partie du spectacle.

Des petits papillons symphoniques? «J'ai toujours un certain trac, mais ma grande crainte a toujours été de manquer de souffle sur la scène. Même si je ne suis pas un rockeur qui chante au bout de sa voix...»

Un répertoire très «symphonisable»

Après quelques mois d'inactivité, Jean-Pierre Ferland a inauguré la saison du Patriote de Sainte-Agathe il y a deux semaines. Pas plus de problèmes de souffle qu'il n'en avait eu il y a 48 ans au même endroit, où il avait été le deuxième à chanter, après Gilles Vigneault.

Les immortelles, Fleurs de macadam, Feuille de gui: les chansons de Jean-Pierre Ferland sont-elles plus «symphonisables» que d'autres? avons-nous demandé à Simon Leclerc, spécialiste reconnu de l'orchestration de chansons populaires. Sa liste est longue: d'Isabelle Boulay à Simple Plan, de Rufus Wainwright à Marie Mai... «Orchestrer les chansons de Jean-Pierre, c'est un no-brainer», répond l'ancien choriste de Céline Dion qui est devenu au Québec LE trait d'union entre la musique classique et la pop. «Jean-Pierre est un grand mélodiste en plus d'être un grand poète...»

«Sa musique est un écrin pour sa poésie», ajoute Florence K, qui se produisait en supplémentaire vendredi au Théâtre Outremont dans le cadre de sa tournée I'm Leaving You.

Avec l'OSM, elle chantera entre autres How Insensitive (Insensatez), une pièce de Carlos Jobim inspirée du Prélude no 4 de Chopin, et La foule, valse sud-américaine popularisée par Édith Piaf en 1957 et reprise depuis par des dizaines d'interprètes, dont Bernard Adamus ici (Brun, 2010). Et la foule me pousse entre ses bras...

Dans les bras de «Jean-Pierre», précisément, avec qui «la belle Florence» interprétera La musique: La musique, mon amour de musique/Est-ce que tu m'aimes encore. Combien de musiciens encore? «J'ai décidé d'y aller avec 90», répond Simon Leclerc en expliquant que cette décision était la prérogative de l'orchestrateur. Combien de hautbois? Avec ou sans clarinette basse? Un batteur ou deux?

Composer avec les contraintes

L'OSM se produit souvent dans des contextes «pop», toujours, nous semble-t-il, à la hauteur de sa réputation - rappelons-nous cette magnifique Symphonie rapaillée, avec Jean-François Rivest au pupitre -, même si certains musiciens se ne gênent pas, en privé, pour exprimer leurs réserves. Et on ne parle pas de la propension de la caste à «marcher au ticker».

«Vrai que les règles sont strictes», nous dit Simon Leclerc qui connaît les coutumes de la Maison et s'y conforme. «Quand il reste deux minutes avant la pause, on ne s'embarque pas dans une nouvelle chanson... Une partie de mon travail consiste à faire en sorte que les artistes invités ne ressentent jamais l'impact de ces contraintes.»

Pour Simon Leclerc, en fin de compte, tout est question de respect et de rigueur. Respect du style et de la personnalité de l'invité, respect des compétences et des façons de l'orchestre. Approche éprouvée qui fait que c'est à lui que l'OSM fait le plus souvent appel pour «arranger» ses concerts pop.

Jean-Pierre Ferland ne s'en plaindra pas: «Le chef, les chanteurs, les musiciens: on est tous là pour la même raison. C'est la musique qui nous unit...»

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À la Maison symphonique les 28, 29 et 30 avril.