À compter de cette semaine et jusqu'à la fin mars, le film immersif Harmonielehre, auquel a collaboré l'OSM, est présenté dans le dôme de la Société des arts technologiques. Une expérience déroutante qui laisse le spectateur perplexe en ce qu'elle n'est ni un film ni un concert au sens traditionnel de ces termes.

En effet, on n'assiste pas à Harmonielehre en cinéphile, ni même en mélomane, mais plutôt avec la perspective d'un curieux qui visite un musée d'art contemporain. Un musée où les oeuvres se déplacent d'elles-mêmes et tournent autour du visiteur au son de l'oeuvre d'Adams, avec un effet parfois étourdissant et l'impression furtive de flotter dans le vide. Les images sont tantôt froides et conceptuelles, tantôt oniriques et éblouissantes, sans fil conducteur évident si ce n'est celui de la somptueuse musique de John Adams.

Après un certain temps, on acquiert l'impression d'être plongé au centre d'une sculpture géante en mouvement dont on fait un peu partie sans contrôler ce qui s'y passe. Et comme c'est un peu cela, le but de l'immersion, on peut dire qu'à cet égard, l'expérience est réussie, mais à condition d'abandonner ses repères et de se laisser emporter.

Bémols

En cette ère de haute définition, des images aussi floues pour les séquences filmées de l'orchestre sont décevantes. Heureusement, il ne s'agit pas d'un documentaire sur l'OSM, ni d'un concert filmé, ni d'une simple expérience symphonique traditionnelle agrémentée d'images, mais bien d'une création entièrement nouvelle inspirée de l'oeuvre éponyme.

Les séquences filmées dans la Maison symphonique ne sont présentes qu'au début et à la fin. Rapidement, l'OSM, ses musiciens et son chef Kent Nagano se fragmentent en éclats flottants qui font place aux images générées par ordinateur évoluant au gré de la musique.

Il importe de mentionner que l'audiophile avide de perfection sonore sera déçu, car sur ce plan, le résultat est aussi imparfait. Malgré l'utilisation de 96 micros pour la captation, les différents timbres de l'orchestre se fondent dans une masse sonore un peu indistincte qui ne rend pas justice à la virtuosité des interprètes.

On ne le dira jamais assez: rien ne remplace l'impression directe d'un vrai concert. Mais là n'était pas le but des auteurs, qui nous invitent plutôt à explorer avec eux un nouvel univers.

Bien qu'imparfait techniquement, Harmonielehre invite le spectateur à une réflexion sur l'art et la musique, et représente une sortie appréciable et différente. «Tripatif», comme dirait Jacques Languirand!