L'Orchestre symphonique de Montréal (OSM) lance aujourd'hui le CD Mahler - Orchesterlieder mettant en vedette le baryton allemand Christian Gerhaher. Cet enregistrement réalisé à la Maison symphonique en janvier 2012 est le huitième de l'OSM sous la direction de Kent Nagano et il s'inscrit dans la continuité du Das Lied von der Erde (Le chant de la terre), du même Mahler, auquel a également participé Gerhaher en 2009.

La Presse : Quand avez-vous fait la connaissance de Christian Gerhaher?

Kent Nagano : On a fait un Requiem allemand de Brahms avec l'Orchestre symphonique de Chicago [en 2007]. Ce premier contact a été tellement fort qu'on a travaillé souvent ensemble depuis. Chaque fois, je constate qu'il a évolué. D'ailleurs, le public montréalais a senti tout de suite que Christian Gerhaher était spécial quand il a chanté pour la première fois avec l'OSM en 2009. Ce n'est pas tout le monde dans la salle qui comprenait l'allemand, pourtant le silence était remarquable quand Gerhaher chantait. C'était en janvier et on n'entend presque pas les gens tousser sur l'enregistrement...

L.P. : Qu'est-ce qui fait de M. Gerhaher un grand interprète de Mahler?

K.N. : La façon dont il utilise sa voix pour servir le texte et le compositeur. Ça transcende l'émotion, la passion et atteint un rare niveau de raffinement. La musique de Mahler est tellement émotionnelle qu'il y a risque de tomber dans le mélodramatique. Pas avec M. Gerhaher. On sent sa recherche et sa réflexion dans la prononciation de chaque mot, dans une consonne allongée ou une voyelle un peu plus sombre. Et sa voix est un cadeau de Dieu.

L.P. : La première fois que vous avez dirigé l'OSM, en 1999, c'était dans la neuvième Symphonie de Mahler. En quoi ce compositeur vous touche-t-il particulièrement?

K.N. : En ce XXIe siècle, Mahler nous touche d'une façon très puissante, très directe. Les thématiques de ses lieder sont très contemporaines. Il a une manière d'illuminer l'aspect humain de façon à ce que tout le monde puisse être sensible à son propos.