Beethoven occupe la majeure partie de ce concert démesurément long qui nous mène passé 22 h 30. L'OSM oublie les gens qui doivent se lever tôt le matin! Mais, ne serait-ce que pour réentendre les première et septième Symphonies jouées avec un tel sens du renouvellement, l'événement vaut le déplacement.

En montant au pupitre, Kent Nagano annonce que le concert est enregistré pour le disque. Il invite même les deux techniciens de Sony à venir saluer le public. Sans doute stimulé par le fait que l'exécution sera préservée pour la postérité, notre maestro apporte à ces deux oeuvres pourtant très familières une pensée, une énergie, une précision, un soin du détail qui en rachaîchissent miraculeusement l'écoute.

La première Symphonie est une chose légère et souriante, dans l'esprit de Haydn, et il la traduit comme telle. Même approche pour la septième Symphonie. Chef-d'oeuvre de la maturité et peut-être la plus moderne et la plus audacieuse du corpus, il en souligne à la fois la grandeur et l'ivresse, concluant cette «apothéose de la danse» (pour citer Wagner) dans un étourdissant tempo évoquant quelque bacchanale.

Les deux oeuvres, et plus particulièrement la très ambitieuse septième, illustrent l'extraordinaire virtuosité de l'OSM, et ce, à chaque instant et dans toutes les sections. Le placement des violons de part et d'autre du podium donne du relief à leurs dialogues, le recours à l'édition Bärenreiter découvre de nouvelles harmonies et de nouveaux accents, et, bien sûr, l'exécution de toutes les reprises sans exception restitue les partitions dans leur absolue intégralité.

De Beethoven encore, Nagano ajoute la pièce de circonstance inspirée par la victoire de Wellington sur les Français en 1813 à Vitoria (ville d'Espagne dont le nom fit l'objet de quelques calembours et fautes d'orthographe). Ces 15 minutes allongent indûment le concert mais amusent la salle comble. Placés dans les hauteurs, de chaque côté de l'orgue, deux groupes de musiciens, représentant les deux armées, suggèrent coups de canons et de mousquets; l'exercice conduit à une Symphonie de la victoire mobilisant tout l'orchestre.

Le Concerto à la mémoire d'un ange d'Alban Berg complète le programme, avec Viviane Hagner remplaçant Christian Tetzlaff. Invitée ici maintes fois par Nagano, la violoniste de 36 ans joue sans partition, sans erreur, mais aussi sans beaucoup d'engagement, ce concerto très long (26 minutes cette fois-ci) qui reste désespérément rébarbatif, même après plus de 75 ans d'existence.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef d'orchestre: Kent Nagano. Soliste: Viviane Hagner, violoniste. Hier soir, Maison symphonique, Place des Arts; reprise ce soir, 20 h. Séries «Grands Concerts».

Programme:

Symphonie no 1, en do majeur, op. 21 (1800) - Beethoven

Concerto pour violon et orchestre (Dem Andenken eines Engels) (1935) - Berg

Wellingtons Sieg, oder Die Schlacht bei Victoria, op. 91 (1813) - Beethoven

Symphonie no 7, en la majeur, op. 92 (1812-13) - Beethoven