De Midori, nous avons eu, dans le passé, le meilleur et le pire. Je me rappelle encore ses débuts ici en 1986, à 14 ans, dans le Concerto op. 6 de Paganini, avec l'OSM. À cette musique qui n'est certes pas la plus grande qui soit, la petite Japonaise apportait la précision et la conviction d'une violoniste de carrière... à 14 ans! Elle nous revint maintes fois, ne laissant jamais de souvenir particulier, sauf dans un cas que j'ai encore trop bien en mémoire : en 2001, soit 15 ans plus tard, à Pro Musica, un récital quasi désastreux où l'on ne reconnaissait plus l'enfant prodige d'autrefois.

Il était donc pour le moins surprenant de voir son nom affiché au Festival de Lanaudière dans une intégrale des Sonates et Partitas pour violon seul de Bach. Je n'ai pas voulu monter jusqu'à Sainte-Mélanie pour voir où en était la santé violonistique de l'ex-enfant prodige devenue une femme de 40 ans et me suis contenté d'aller écouter son deuxième programme dans la grande banlieue, à Repentigny.

En 1986, j'avais la révélation d'un phénomène du violon. Cette fois, j'ai découvert une musicienne racée et une interprète de Bach que l'on peut prendre très au sérieux. Dans la belle église toute blanche de La Purification, qui peut recevoir 350 personnes et qui était presque remplie, la minuscule violoniste, entièrement concentrée sur son Guarnerius del Gesù, a traversé de mémoire, et sans omettre une seule reprise, les 19 pièces comprises dans la deuxième Sonate et les première et troisième Partitas.

Son exécution fut toujours d'une grande clarté, d'une absolue justesse et d'une belle sonorité, notamment au grave. L'interprétation proprement dite appelle plus de réserves. Midori utilise très peu de vibrato et ne varie à peu près jamais les reprises. Cette double retenue ne fait qu'accentuer l'aridité de cette musique qu'une Isabelle Faust, par exemple, l'automne dernier au Festival Bach, transfigurait tout en respectant ce qui est écrit. Par son extrême rigueur, Midori devient en quelque sorte prisonnière du texte. C'est un choix que je respecte, sans toutefois y adhérer.

MIDORI, violoniste. Mardi soir, église de La Purification, de Repentigny.

Programme :

Sonate no 2, en la mineur, BWV 1003, Partita no 1, en si mineur, BWV 1002, et Partita no 3, en mi majeur, BWV 1006, pour violon seul (c. 1720) - J. S. Bach