La très médiatisée pianiste chinoise Zhu Xiao-Mei avait attiré une salle comble, soit 550 personnes, dimanche après-midi, au Centre d'arts Orford. Seule oeuvre au programme: les Variations Goldberg de Bach, dont elle signa en 1990 un enregistrement qui la fit connaître.

Son récital dura, comme son disque, une heure. Il n'y eut ni entracte, ni rappel. Cheveux noirs coupés «en garçon», petite chemise blanche, pantalon noir, la musicienne de 63 ans fixe le piano pendant qu'elle joue; seuls les doigts bougent. Le spectacle ne saurait être plus sobre, surtout que la salle est plongée dans l'obscurité - à la demande de l'artiste, fait savoir le directeur artistique, Jean-François Rivest, avant le récital.

Ce même ascétisme accompagnait le disque des Goldberg. Hélas! les choses se gâtent bientôt. La pianiste commence à se tromper dès la première des 30 variations, où elle passe une note. Or, chez Bach, comme chez Mozart, une note qui manque, cela s'entend. Plus tard, elle joue d'autres notes que celles qui sont écrites, ou bien s'embourbe, ou bien éprouve un trou de mémoire dont elle émerge habilement, j'en conviens.

J'ai beaucoup de respect pour cette femme qui a énormément souffert. Mais il y a des limites: on ne peut pas ignorer tant de fausses notes. J'en ai compté à la variation 5, à la variation 11, à la variation 16, à la variation 20, à la variation 29, à la variation 30.

Le disque était une merveille de clarté, mais il date de plus de 20 ans. De toute façon, on peut tout corriger sur un disque.

La pianiste fait maintenant plus de reprises, elle apporte de nouveaux accents et de nouveaux ornements ici et là, sa main gauche est plus détaillée, et elle a éliminé ce rubato qu'elle se permettait, sur le disque, dans l'exposé du thème et à son retour, à la fin.

Elle fait des erreurs mais, en même temps, on ne saurait nier qu'elle possède la technique requise pour traverser avec un réel sens de l'unité et du contraste cette partition très difficile. Ainsi, dans ses croisements de mains, je revoyais cette vidéo de Wanda Landowska au clavecin. J'oublie donc le reste... y compris les toux qui montaient de la salle avec une rare insistance.

________________________________________________________________________

ZHU XIAO-MEI, pianiste. Dimanche après-midi, salle Gilles-Lefebvre du Centre d'arts Orford. Programme: Variations Goldberg, BWV 988 (1742) - J. S. Bach.