Déçu par l'annulation (pour cause de grève) de son concert du 14 avril à l'Orchestre de l'Université de Montréal où il avait programmé la Onzième de Chostakovitch, Jean-François Rivest a pu se rattraper hier, appelé à quelques jours d'avis par l'OSM à remplacer le chef invité Franz-Paul Decker, qui fut un ancien titulaire de l'orchestre comme Rivest lui-même y fut déjà «chef en résidence».

L'annulation de Decker (cette fois, cause de maladie) entraîna le remplacement de la Alpensinfonie par un autre Strauss, un peu moins exigeant cependant: le poème symphonique Also sprach Zarathustra associé au cinéma. On s'étonne simplement que l'OSM n'ait pas trouvé le moyen, en près d'une semaine de délai, d'inscrire les changements nécessaires dans le programme imprimé. C'est mardi qu'on apprit le désistement de Decker, soit cinq jours avant le concert. Et pourtant, hier encore, la moitié de la page-programme était occupée par la liste détaillée des 22 épisodes de cette Alpensinfonie dont on n'allait pas entendre une seule note.

Produit du gigantisme musical du tournant du siècle, Zarathustra illustra une fois de plus le haut professionnalisme de Rivest et de l'OSM, l'un et l'autre conférant l'élan requis à une partition riche et complexe qu'ils connaissent déjà bien. D'infimes imperfections ne diminuèrent en rien le résultat qui, pendant 35 minutes, maintint l'intérêt inchangé. En fait, l'exécution surpassa, en déploiement orchestral et en pensée, certaines qui ont pourtant été préparées de plus longue haleine. Mémorables, ces mesures terminales oscillant entre si majeur et do majeur.

Rivest et l'OSM ouvrirent le concert avec un autre Strauss, celui-ci maintenu du programme original : la deuxième Suite de Valses de Rosenkavalier, plus courte (neuf minutes) mais moins intéressante que les suites connues. Comme valsant avec tout l'orchestre devenu sa partenaire, le chef invité y signa sa première réussite de l'après-midi.

La partie concerto resta également inchangée : James Ehnes dans le célébrissime Mendelssohn, dont il a donné au disque une version exceptionnelle. Même quasi-perfection hier dans le discours musical, l'articulation, l'intonation et le son... et le commentaire de l'orchestre réduit de moitié. Ovationné et rappelé par l'auditoire debout, le jeune violoniste joua deux Caprices de Paganini : d'abord le célèbre 24e, ensuite le 16e.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité : Jean-François Rivest. Soliste : James Ehnes, violoniste. Hier après-midi, Maison symphonique, Place des Arts. Série «Dimanches en musique». Programme : Deuxième suite de Valses de l'opéra Der Rosenkavalier, op. 59 (1911) - Strauss Concerto pour violon et orchestre en mi mineur, op. 64 (1844) - Mendelssohn Also sprach Zarathustra, poème symphonique, op. 30 (1896) - Strauss