Concurrents sur notre scène musicale - pour ne pas dire plus! -, les chefs respectifs de nos deux principaux orchestres se rencontrent, pur hasard, sur le même terrain: la musique d'Anton Bruckner. En avril dernier, avec l'Orchestre Métropolitain, Yannick Nézet-Séguin donnait en concert et enregistrait la quatrième Symphonie, dite Romantique. De son côté, Kent Nagano dirigeait la septième Symphonie à l'OSM en mai 2009, mais c'est avec le Bayerisches Staatsorchester (Orchestre d'État de Bavière) qu'il l'enregistrait en septembre 2010. Les deux disques viennent de paraître.

Passons vite sur la complexe question des éditions utilisées. Nézet-Séguin revient à celle de Robert Haas (1936), qui est presque identique à celle, plus courante, de Leopold Nowak (1953). Le disque de Nagano n'indique pas l'édition, mais, là encore, c'est Nowak (1954), tout comme au concert.

Les deux enregistrements ont été réalisés dans des églises, mais les preneurs de son ont résolu les problèmes de réverbération associés à ces lieux.

Bien que séparés par une génération, les deux chefs ont Bruckner bien ancré dans leur répertoire et tous deux signent ici des interprétations respectueuses de cette musique noble et grandiose. À valeur égale, les deux symphonies créent pourtant des impressions bien différentes. Nagano reproduit scrupuleusement toutes les nuances; Nézet-Séguin les vit intensément. Le Bruckner de Nagano n'émeut jamais; celui de Nézet-Séguin vient du coeur et fait vibrer à chaque instant. Cette Romantique que j'ai entendue je ne sais plus combien de fois, j'ai le sentiment de la découvrir, alors que cette version de la Septième ne se distingue en rien de douzaines d'autres. Ce rapprochement m'apporte une nouvelle confirmation - et j'ose le dire - que Nézet-Séguin est un plus grand musicien que Nagano.

Le disque de Nagano a été enregistré en concert et on note ici et là de très légères imprécisions de jeu, alors qu'il n'y en a pas chez Nézet-Séguin. Par ailleurs, à l'engagement total du chef s'ajoute, au Métropolitain, la réponse immédiate et entière de l'orchestre. Toutes les sections, et en particulier les cuivres, très sollicités, sont du plus haut niveau. À la fois puissant et souple, l'OM rejoint ici les plus grandes formations brucknériennes du disque.

Bruckner

Yannick Nézet-Séguin

Symphonie No 4

ATMA ACD2 2667

*****

Bruckner

Kent Nagano

Symphonie No 7

Sony 88697909452

***1/2