Coïncidence, nos deux principales sociétés de musique de chambre présentaient dimanche deux quatuors à cordes étrangers. Dans l'après-midi, au LMMC, c'était le Miro, des États-Unis; en soirée, à Pro Musica, le Talich, de la République tchèque. Comme à son précédent passage ici, l'ensemble américain s'adjoignait le pianiste israélien Shai Wosner pour deux oeuvres. On aura noté, chez les deux ensembles, un nouveau second-violon. Au Miro, une femme a remplacé une femme. L'affaire se complique au Talich où le second-violon porte deux noms différents dans le programme.

Peu importe, en vérité. Presque tous les quatuors connaissent des changements d'effectifs au cours de leur existence, ce qui est aussi le cas du Miro, formé en 1995, et du Talich, de 30 ans son aîné. Certains quatuors conservent leur personnalité malgré l'arrivée de nouveaux archets; pour d'autres, l'adaptation est plus difficile.

On écoutait le Miro seul dans une pièce seulement, le bref Quartettsatz d'un quatuor inachevé de Schubert; le reste du programme le plaçait en dialogue avec le pianiste. De plus, il jouait à Pollack, qui est une salle intime à côté de cette Maison symphonique qui conférait une ampleur quasi orchestrale au Talich. Malgré des contextes fort différents, la supériorité du Talich ne faisait aucun doute.

Les concerts passés du Miro m'avaient laissé la meilleure impression, comme d'ailleurs la précédente participation du pianiste. Cette fois, déception. L'effrayante tension qui anime le Schubert n'y était pas, on sentait de la faiblesse chez les deux violons alternant au premier-pupitre et, surtout, le pianiste jouait tellement fort qu'on se demande si l'instrument pourra encore servir. De tout cela, je retiens le son, curieux mais toujours expressif, du violoncelliste, et ce malgré le petit accident survenu à son archet au début du Dvorak.

En total contraste, quel bonheur sans mélange au Talich, deux heures plus tard, où j'oublie la dimension de la salle et retrouve l'ensemble tchèque tel qu'il était à ses derniers passages à Pro Musica et au LMMC, avec ce jeu naturel et jamais forcé qui sert si bien Mozart et Schubert, cet équilibre dans les sonorités et, par-dessus tout, cette concentration des quatre coéquipiers sur une seule chose : le message musical.

Comme pièce représentant son pays, le Talich avait choisi le premier Quatuor d'Erwin Schulhoff. Révélée par le Ysaye au LMMC en 1993, l'oeuvre de 18 minutes multiplie les effets instrumentaux à des fins expressives, à la manière de Bartok, et avec autant d'impact. Un Beethoven en rappel : la Cavatine du Quatuor op. 130.

QUATUOR À CORDES MIRO - Daniel Ching et Tereza Stanislav (violons), John Largess (alto) et Joshua Gindele (violoncelle) - et SHAI WOSNER, pianiste. Dimanche après-midi, Pollack Hall de l'Université McGill. Présentation : Ladies' Morning Musical Club.

Programme :

Quatuor no 12, en do mineur, D. 703 (1820) - Schubert

Quatuor avec piano no 2, en mi bémol majeur, op. 87, B. 162 (1889) - Dvorak

Quintette avec piano en fa mineur, op. 34 (1865) - Brahms

QUATUOR À CORDES TALICH - Jan Talich et Roman Patocka (violons), Vladimir Bukac (alto) et Petr Prause (violoncelle). Dimanche soir, Maison symphonique de la Place des Arts. Présentation : Société Pro Musica.

Programme :

Quatuor no 14, en sol majeur, K. 387 (1782) - Mozart

Quatuor no 1 (1924) - Schulhoff

Quatuor no 13, en la mineur, op. 29, D. 804 (1824) - Schubert