Arion complète sa 30e saison ce week-end. Cette création de la flûtiste Claire Guimond était, à l'origine, le modeste Ensemble Arion : quatre instrumentistes ne jouant que du baroque. Pendant des années, Arion se limita à ce quatuor : flûte, violon, viole de gambe, clavecin.

Pour des raisons qui lui appartiennent mais qu'on imagine facilement, la fondatrice a élargi ce cadre sur plusieurs plans. Le petit quatuor des débuts est devenu l'Orchestre baroque Arion qui peut rassembler jusqu'à 25 musiciens, comme c'est le cas pour le présent programme, lequel n'a d'ailleurs plus rien de baroque puisqu'il est partagé entre Haydn et Mozart. Le nouvel Arion se rendra-t-il jusqu'à Beethoven? «Mozart, c'est notre limite!», explique Claire Guimond en souriant.

Les musiciens d'Arion exécutent ce programme Haydn-Mozart sur les instruments dits «d'époque» (cordes de boyau, cuivres «naturels»), accordés au diapason 430, qu'ils utilisent pour le répertoire baroque, en faisant cependant certaines adaptations quant aux archets et aux bois. Ainsi, le hautbois et le basson tenus par les solistes de la Symphonie concertante de Haydn sont de type «classique», et non «baroque» ou «moderne». Une question de nombre de clés, pour spécialistes dont je ne suis pas.

De petite taille et très nerveux, le violoncelliste néerlandais Jaap ter Linden revient chez Arion comme chef invité et joue le violoncelle dans le Haydn tout en donnant quelques indications à l'orchestre par un mouvement d'archet ou un simple regard. Au finale, un autre des solistes, le violoniste russe Dmitry Sinkovsky, très agité et cheveux en queue de cheval, lance à tous le signal du départ. Matthew Jennejohn au hautbois et Anna Marsh au basson complètent un quatuor de solistes qui serait impeccable si le violoncelliste jouait plus juste!

Le nouveau venu Sinkovsky est ensuite le soliste du Concerto K. 219 de Mozart. La technique est, comme on dit, époustouflante, les cadences sont plus nombreuses que ce qu'indique la partition, mais le jeu est brutal, la justesse est souvent approximative et l'ensemble est passablement vulgaire.

Finalement, le meilleur moment du concert vient après l'entracte : c'est la grande 41e Symphonie de Mozart, la Jupiter. Ici, Jaap ter Linden se contente d'être chef, debout devant sa partition et devant l'orchestre, et Chantal Rémillard, le violon-solo d'Arion, cède sa place à M. Sinkovsky.

Cette Jupiter jouée avec toutes les reprises (y compris celles qu'on ne fait jamais) totalise 35 minutes. Le chef invité apporte un intéressant relief à chacun des quatre mouvements et l'orchestre lui répond magnifiquement. Passant d'un orchestre symphonique de 80 musiciens à une formation baroque de 25, la partition familière prend une nouvelle physionomie : les effectifs réduits clarifient la polyphonie et les timbres crus des cuivres «naturels» colorent le tout différemment.

ORCHESTRE BAROQUE ARION. Jaap ter Linden, chef invité et violoncelliste, Dmitry Sinkovsky, violoniste, Matthew Jennejohn, hautboïste, et Anna Marsh, bassoniste. Jeudi soir, Redpath Hall de l'Université McGill. Reprise demain, 14 h. Conférence de Lucie Renaud 45 minutes avant le concert.

Programme :

Symphonie concertante pour violon, violoncelle, hautbois, basson et orchestre en si bémol majeur, Hob. I :105 (1792) - Haydn

Concerto pour violon et orchestre no 5, en la majeur, K. 219 ( Turc() (1775) - Mozart

Symphonie no 41, en do majeur, K. 551 ( Jupiter ) (1788) - Mozart